À la fin de chaque année, j’aime prendre connaissance des listes proposées par mes chroniqueurs préférés, soit les films, les livres et les spectacles qui se sont démarqués durant les 12 derniers mois. C’est en quelque sorte une tradition. C’est ce qui m’a donné l’idée de vous proposer mon top 5 des décisions rendues en droit du travail, dans mes domaines de prédilection, au cours de 2011. Et vous, quelles décisions ont retenu votre attention?

1. Devoir de représentation du syndicat

Une infirmière ayant fait l’objet d’une mesure disciplinaire pour avoir harcelé psychologiquement une collègue a porté plainte contre son syndicat parce qu’il avait refusé de déposer un grief en son nom. Elle a reproché au syndicat d’avoir été gravement négligent dans la conduite d’une enquête. Je retiens ce commentaire du juge Vézina, de la Cour d’appel, qui a eu l’occasion de se prononcer dans ce dossier : «[L]e Syndicat a agi […] dans la recherche d’un objectif louable, soit de faire obstacle au harcèlement psychologique de manière à favoriser l’harmonie au travail parmi ses membres. [Toutefois, en] tentant de relever ce défi, [il] a oublié son rôle traditionnel – je dirais même son rôle premier – de défense d’une de ses membres visée par une sanction patronale.» La Cour d’appel a confirmé la décision de la Commission des relations du travail (CRT) qui avait accueilli la plainte de l’infirmière.

Pour en savoir plus : Vallières c. Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (CPS et APTMQ), (C.A., 2011-03-30), 2011 QCCA 588, SOQUIJ AZ-50737307, 2011EXP-1218, 2011EXPT-718, J.E. 2011-654, D.T.E. 2011T-247, [2011] R.J.D.T. 389.

2. Normes du travail

La Société de transport de Montréal (STM) a été déclarée coupable d’outrage au tribunal pour avoir, sans excuse légitime, omis de réintégrer une salariée dans l’emploi qu’elle occupait avant son congédiement. Selon la juge Claudette Picard, de la Cour supérieure, la façon dont la STM a traité la réintégration de la salariée démontrait une volonté claire d’enfreindre l’ordonnance rendue par la CRT dans le contexte d’une plainte en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail.

Pour en savoir plus : Lessard c. Société de transport de Montréal (C.S., 2011-09-14), 2011 QCCS 4932, SOQUIJ AZ-50787981, 2011EXP-3070, 2011EXPT-1798, J.E. 2011-1714, D.T.E. 2011T-664.

3. Compétence de l’arbitre de griefs

 En raison d’une lésion professionnelle, la salariée n’est plus en mesure d’occuper son poste de croupière au Casino du Lac-Leamy. Elle a déposé des griefs afin de contester son congédiement et de réclamer son retour au travail dans un autre poste. L’employeur a soutenu que les questions en litige relevaient de la compétence exclusive de la CSST. Celle-ci avait déjà déterminé un emploi convenable, lequel n’existe pas au Casino. L’arbitre Denis Nadeau a rejeté l’objection patronale. Il souligne que la convention collective contient des conditions de travail plus avantageuses que ce que prévoit la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. La clause qui traite, à titre de mesure d’accommodement, de la «relocalisation» du salarié handicapé «dans un autre emploi» serait donc valide.

 Pour en savoir plus : Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 3993 (unité croupiers) et Société des casinos du Québec inc. (Danielle Meunier)*, (T.A., 2010-08-29 (décision rectifiée le 2010-09-18)), SOQUIJ AZ-50668944, 2010EXPT-2124, D.T.E. 2010T-622, [2010] R.J.D.T. 1232. À noter que la Cour supérieure vient de rejeter la requête en révision judiciaire de cette sentence interlocutoire (Société des casinos du Québec c. Nadeau (C.S., 2011-12-14), 2011 QCCS 6872, SOQUIJ AZ-50815387).

4. Liberté d’association

La Cour d’appel a refusé de déclarer inopérante la Loi concernant les unités de négociation dans le secteur des affaires sociales (loi 30). À l’unanimité, les juges ont conclu que les associations de salariés ne peuvent prétendre avoir le droit à l’accréditation auprès d’un employeur sur la seule base d’une unité de négociation déterminée en fonction de la seule volonté des salariés. Ainsi, la fixation des unités de négociation par la loi 30 ne porte pas atteinte à la liberté de négociation.

Pour en savoir plus : Québec (Procureur général) c. Confédération des syndicats nationaux (CSN)*, (C.A., 2011-07-06 (jugement rectifié le 2011-07-08)), 2011 QCCA 1247, SOQUIJ AZ-50766580, 2011EXP-2254, 2011EXPT-1333, J.E. 2011-1240, D.T.E. 2011T-461, [2011] R.J.Q. 1367, [2011] R.J.D.T. 690. Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême, 2011-09-29 (C.S. Can.), 34479.

5. Langue de travail

Après avoir conclu que l’employeur avait violé la Charte de la langue française en exigeant, sans motif raisonnable, la connaissance de l’anglais de la part du candidat qui souhaitait obtenir le poste de responsable de la maintenance à l’Hôtel Quality Inn de Lévis, la CRT s’est prononcée relativement aux mesures de réparation. Au sujet des dommages-intérêts punitifs, la commissaire Maryse Morin écrit : «Il est impératif qu’une entreprise comme Quality Inn connaisse et respecte les droits fondamentaux énoncés depuis longtemps dans la Charte de la langue française. [Elle] est une entreprise importante qui doit respecter les valeurs fondamentales de la société québécoise inscrites à la Charte. Le versement de dommages-intérêts punitifs pour une somme de 2 000 $ devrait permettre de dénoncer un tel comportement et d’assurer que la faute commise ne se répète pas.»

Pour en savoir plus : Pouliot et Quality Inn & Suites Lévis (C.R.T., 2011-04-29), 2011 QCCRT 0214, SOQUIJ AZ-50751762, 2011EXPT-972, D.T.E. 2011T-352.

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