Un nouveau chapitre vient de s’ajouter à l’histoire de Michel Dumont, déclaré coupable puis acquitté d’agression sexuelle. Rappelons d’abord que cette saga judiciaire a été transposée récemment au grand écran. La Cour d’appel vient ainsi tout juste de débouter Michel Dumont de l’appel interjeté contre le jugement de première instance qui avait rejeté le recours en responsabilité civile qu’il avait entrepris l’encontre du procureur général du Québec et du procureur général du Canada.

Déclaré coupable en juin 1991 sous quatre chefs d’accusation relatifs à une agression sexuelle, Dumont s’est vu imposer une peine de 52 mois d’emprisonnement. L’appel de cette sentence a été rejeté en février 1994. Or, avant même l’audition de cet appel, la victime a cru apercevoir le sosie de Dumont, qu’elle savait incarcéré. Le 22 février 2001, la Cour d’appel a statué que les déclarations de la victime relatives à ses doutes quant à l’identification de son agresseur étaient admissibles à titre de nouvelle preuve et a acquitté Dumont. Ce dernier et sa conjointe ont alors intenté un recours en réclamation d’une indemnisation de plus de 2,5 millions de dollars.

Selon la Cour d’appel, la négligence du ministère public dans le traitement de la nouvelle information reçue de la victime quant à l’identité de son agresseur n’a pas été démontrée. La déclaration de cette dernière ainsi que le complément d’enquête policière ont d’ailleurs été divulgués à l’avocat de Dumont. Lors de l’audition de l’appel, en février 1994, cet avocat n’a toutefois fait aucune référence à ces documents. Or, la décision de la Couronne de ne pas soulever elle-même cette nouvelle preuve et, de surcroît, sa décision d’insister sur la fiabilité de l’identification faite par la victime au procès dans son mémoire d’appel, ne constituent pas une faute. En effet, à la lumière des informations disponibles à l’époque de l’appel, la Couronne ne devait pas s’immiscer dans la preuve ou la stratégie de la défense. En outre, son comportement n’était pas animé d’une intention malveillante. Dumont et sa conjointe n’ont donc pas établi que le comportement des avocats du ministère public pendant l’appel était contraire aux règles de conduite qui s’imposaient suivant les circonstances, les usages ou la loi.

De plus, les autorités carcérales n’ont commis aucune faute en détenant Dumont une fois informés du doute soulevé par la victime quant à son innocence. Les autorités carcérales n’ont aucun pouvoir d’évaluer la culpabilité ou l’innocence des détenus ou de modifier les décisions judiciaires selon leur évaluation subjective de la situation d’un détenu.

Enfin, en raison notamment de l’immunité relative qui protège l’exercice du pouvoir discrétionnaire des procureurs de la Couronne, Dumont n’a droit à aucune indemnité aux termes de l’article 24 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés. De plus, il ne pouvait invoquer le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui a été ratifié mais non mis en œuvre en droit interne canadien. En effet, il n’existe pas, au Canada, de régime de responsabilité sans faute permettant d’indemniser automatiquement les victimes d’erreur judiciaire.

Référence

Dumont c. Québec (Procureur général), (C.A., 2012-11-16), 2012 QCCA 2039, SOQUIJ AZ-50913449

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