Au cours des dernières années, plusieurs conseils de discipline ont eu à se pencher sur des chefs d’accusation dont le libellé mentionnait expressément que l’infraction reprochée au professionnel en cause avait été commise sur Internet, que ce soit en raison de la nature d’un site consulté, d’une publicité qui y aurait été diffusée ou encore d’un texte qui y aurait été publié. Je vous invite à lire l’article que j’ai rédigé à ce sujet, intitulé : Professionnels sur la toile… le syndic veille!  J’y fais notamment mention, en ce qui concerne la publication de textes, d’une décision rendue par le Conseil de discipline du Barreau du Québec qui a été confirmée par le Tribunal des professions. Dans cette affaire, l’avocat intimé, à qui il était reproché de ne pas avoir soutenu l’autorité des tribunaux, s’est vu imposer une réprimande pour des propos qu’il avait tenus à l’endroit de la magistrature dans un texte de 92 pages diffusé sur un site Web. J’en profite pour porter à votre attention une décision rendue par le Conseil de discipline des agronomes du Québec, dont je n’ai pas fait mention dans mon article, et qui apporte un éclairage intéressant sur la possibilité pour un professionnel de critiquer publiquement son ordre professionnel et sur les nuances qui s’imposent au moment d’appliquer les codes de déontologie respectifs de chacune des professions.

Dans cette affaire, il était reproché à l’agronome intimé d’avoir tenu des propos susceptibles de nuire à la réputation de la profession d’agronome en écrivant, à titre de président de l’Association des conseillers en agroenvironnement du Québec, un article intitulé «Agroenvironnement: une perte de sens et un manque de vision» et publié dans le journal hebdomadaire La Terre de chez nous le 26 août 2010. Dans cette affaire, le Conseil de discipline a retenu que l’article publié par le professionnel en cause constituait une critique très sévère du rôle joué par l’État et par son ordre professionnel dans le domaine de l’agroenvironnement, tout en soulignant qu’une critique n’est pas nécessairement déraisonnable parce qu’elle est très sévère.

Concluant que l’agronome intimé, au nom de l’Association des conseillers en agroenvironnement, s’était limité à émettre un point de vue différent sur une situation donnée et à inviter à la discussion, il l’a acquitté, estimant que la mise en balance entre le droit à la liberté d’expression de l’intimé et les objectifs visés par l’article 3 du Code de déontologie des agronomes était proportionnée. Retenons que le Conseil a également précisé qu’«un professionnel a certainement le droit de ne pas être d’accord avec les positions prises par son ordre professionnel et de manifester publiquement son désaccord, à la condition que le tout se fasse correctement».

Référence

Agronomes (Ordre professionnel des) c. Comtois (C.D. Agr., 2012-08-03), SOQUIJ AZ-50883997, 2012EXP-4325

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