Dans l’affaire Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et Centre de santé et de services sociaux — Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke (.PDF), l’employeur a démontré que l’exigence relative à l’administration des sacrements et à l’animation des rites catholiques constituait une exigence professionnelle justifiée et qu’il ne pouvait accommoder le plaignant sans subir une contrainte excessive.

L’employeur exploite un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). Sa clientèle : 750 personnes âgées, dont la moyenne d’âge se situe à 83 ans, catholiques et pratiquant leur religion dans une proportion oscillant entre 93 et 94 %. L’un des prêtres, un abbé qui administre les sacrements (eucharistie et onction des malades) et qui anime les rites religieux prend sa retraite. L’employeur affiche donc un poste d’«animateur de pastorale» — plus tard rebaptisé «intervenant en soins spirituels» — ayant notamment pour exigence d’être capable d’administrer les sacrements et d’animer les rites de la religion catholique.onstituait une exigence professionnelle justifiée et qu’il ne pouvait accommoder le plaignant sans subir une contrainte excessive.

L’employeur rejette la candidature d’un salarié de religion musulmane, qui travaille déjà à titre d’intervenant en soins spirituels chez lui. Il décide toutefois de lui confier certaines heures de travail tout en embauchant un aumônier pour dire la messe et donner les sacrements. Ce salarié, qui détient le plus d’ancienneté parmi les salariés inscrits sur la liste de disponibilité, conteste alors le refus de l’employeur de lui accorder plusieurs assignations de travail de même que l’exigence particulière incluse dans l’avis d’affichage.

Le litige soulève également la question des articles 3, 10, 16 et 20 de la Charte des droits et libertés de la personne. Selon ce candidat, l’exigence contenue à l’avis d’affichage est discriminatoire à son endroit.

L’arbitre de griefs conclut que, même si le plaignant a établi une preuve prima facie du préjudice subi et du lien avec le motif de discrimination, soit la religion, l’employeur a réussi à démontrer que sa norme était fondée sur des aptitudes ou des qualités requises pour occuper l’emploi d’intervenant en soins spirituels au sens de l’article 20 de la charte. Il s’agit d’une exigence professionnelle justifiée. Il a satisfait à son obligation d’accommodement jusqu’à la contrainte excessive.

Droits fondamentaux du salarié et des usagers

Il est intéressant de noter l’analyse faite par l’arbitre des intérêts et des droits en présence. À ce sujet, il souligne que l’employeur a des obligations à l’égard des usagers en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, notamment celles de leur fournir des soins et des services adaptés à leurs besoins ainsi qu’un milieu de vie substitut. Selon lui, compte tenu des besoins de la clientèle, composée largement de personnes de confession catholique, des obligations légales de l’employeur et de sa mission, le lien rationnel entre la norme imposée par celui-ci et les exigences reliées au travail est manifeste.

L’arbitre insiste sur le caractère public de l’institution exploitée par l’employeur. Il souligne que, dans la réalisation de son obligation d’accommodement, l’employeur devait respecter à la fois la mission du centre, son obligation de répondre aux besoins religieux des usagers, le droit fondamental de ces derniers de pratiquer pleinement la religion de leur choix — qui est également protégé par la charte —, le profil diversifié des membres de l’équipe des soins spirituels, les limites d’adaptation découlant de la taille de l’équipe ainsi que les dispositions de la convention collective et les contraintes financières. Il ajoute que les usagers ont droit à la reconnaissance et à l’exercice de leur religion, duquel découlent des besoins religieux qui sont distincts des besoins spirituels.

Enfin, un élément de la preuve qui n’est pas passé inaperçu : la pétition signée par les bénéficiaires exprimant leur volonté que l’on maintienne les services de pastorale dont ils ne voulaient pas être privés…

Référence

Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et Centre de santé et de services sociaux — Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke, (T.A., 2012-12-20), SOQUIJ AZ-50925357, 2013EXP-336, 2013EXPT-194, D.T.E. 2013T-70.

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