Bien que le conseil d’administration d’une coopérative puisse suspendre ou exclure un membre, la décision rendue récemment dans Montpetit c. Coopérative L’Alternative nous rappelle que ce pouvoir doit être exercé dans le respect de certaines conditions.

Montpetit est membre d’une coopérative d’habitation depuis 1996, ce qui lui permet de bénéficier d’un rabais à titre de membre et d’une aide financière. Il doit toutefois, comme tout autre membre, contribuer au fonctionnement de la coopérative. Dans la semaine du 18 au 24 juillet 2010, il a été assigné à l’entretien du terrain, ce qui impliquait de passer la tondeuse et le taille-bordures, tâche dont il s’est acquitté dans la soirée du 24 juillet, se méprenant toutefois quant à la surface qui devait être entretenue. Le lendemain, il a été convoqué par le conseil d’administration de la coopérative au motif que sa tâche n’avait pas été réalisée adéquatement.

Le dossier de Montpetit ne s’est toutefois pas réglé à l’occasion de cette convocation et, entre-temps, il a envoyé plusieurs lettres aux autres membres de la coopérative et à son conseil d’administration, ce qui a finalement amené le conseil à le convoquer non seulement pour discuter de sa tâche d’entretien, mais aussi du harcèlement et de l’intimidation subis par ses membres, soit un élément qui était abordé pour la première fois. Le conseil avait alors décidé de l’exclusion de Montpetit, mais il espérait recevoir des excuses. Montpetit n’a pas pu se présenter à la réunion, et il a plus tard appris son exclusion.

Il a demandé que cette décision soit annulée, faisant valoir qu’elle avait été prise de mauvaise foi puisqu’elle avait été rendue avant même sa convocation et qu’il n’avait pas eu l’occasion de s’expliquer sur le nouveau problème soulevé, soit celui de son comportement.

Le juge Louis Lacoursière, de la Cour supérieure, a conclu que la décision du conseil d’administration devait être annulée. Bien qu’il ait noté que les problèmes de comportement de Montpetit pouvaient, à eux seuls, lui mériter une sanction, il a rappelé que l’article 58 de la Loi sur les coopératives prévoit que la décision du conseil d’administration doit n’être prise qu’après l’argumentation ou la lecture de la déclaration écrite du membre visé. Or, la décision du conseil avait été prise non seulement avant la réunion du conseil où elle devait être rendue, mais aussi avant même que Montpetit ne soit convoqué devant le conseil. Pour le juge Lacoursière, cela constituait une façon abusive de procéder, justifiant l’annulation de la décision d’exclure Montpetit de la coopérative.

Ce dernier a donc eu gain de cause devant le tribunal mais, comme l’indiquait le juge Lacoursière, compte tenu des valeurs coopératives auxquelles disaient adhérer les parties, le dénouement du dossier ne présentait ni victoire ni défaite.

Référence

Montpetit c. Coopérative L’Alternative (C.S., 2013-02-13), 2013 QCCS 1200, SOQUIJ AZ-50949482, 2013EXP-1360, J.E. 2013-747

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