Le 7 décembre 2012, la Loi sur l’intégrité en matière de contrats publics entrait en vigueur au Québec. Mais cela sera-t-il suffisant? La question éthique peut-elle être résolue par la seule adoption de lois?

Le Québec est loin d’être la seule terre où la question est posée quant aux gestes accomplis par nos élus, par les hauts fonctionnaires, les gens d’affaires ou même le citoyen en matière de corruption, de financement politique ou d’évasion fiscale. Dernier scandale en date ayant secoué l’Europe : la fraude fiscale d’un député de l’Assemblée nationale française (Cahuzac) ayant dissimulé une partie de ses revenus dans un compte bancaire secret en Suisse.

Le sociologue français Pierre Lascoumes (du CNRS – Sciences po) constate que « les réglementations adoptées depuis vingt ans » pour lutter contre la fraude fiscale ou contrôler le financement politique « ont connu le sort banal de l’action publique à la française : des principes forts et des applications aléatoires ». Selon lui, il faut, avant d’opter pour de nouvelles mesures, étudier «les failles des dispositifs en place1». Voilà probablement l’approche privilégiée par la Commission Charbonneau au Québec.

M. Lascoumes souligne que «la France ne manque pas de règles en ces domaines, mais elles sont molles, souvent dépourvues de sanction, et surtout peu appliquées». Il relève que la fraude fiscale de Jérôme Cahuzac n’a pas été révélée par les organismes de surveillance existants mais par des révélations privées relayées par les médias qui ont fait office de gendarme.

Ce que Lascoume appelle «l’incivisme fiscal chronique des élites» est facilité par la règle du secret bancaire des banques suisses, à laquelle les États-Unis s’attaquent sans détour. En effet, même si le gouvernement américain n’a pas obtenu du Parlement suisse l’adoption d’une loi (Lex USA) qui autoriserait les banques suisses à lever le secret bancaire et à remettre les renseignements personnels de leurs clients américains, la Suisse a souscrit à l’accord FAT CA, une loi fiscale américaine («Foreign A ccount Tax Compliance A ct») qui permettra aux États-Unis d’obtenir l’imposition de tous les comptes détenus à l’étranger par les personnes soumises à l’impôt aux États-Unis. Il s’agit d’une réglementation américaine unilatérale qui est valable pour tous les pays et exigeant que les institutions financières étrangères transmettent aux autorités fiscales américaines des informations relatives aux comptes américains ou à percevoir un impôt élevé. Dans une déclaration commune, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne ont affirmé leur volonté de conclure avec les États-Unis des accords bilatéraux en vue de faciliter la mise en oeuvre de la législation2. Le poids des États-Unis dans l’économie mondiale leur a permis d’obtenir que leur loi ait une véritable portée extraterritoriale. On peut penser que la collaboration des États membres du G8 ou du G20 à l’action américaine encouragera les échanges multilatéraux de renseignements qui, dans un contexte de mondialisation des échanges, favoriseront l’adoption de comportements éthiques en matière fiscale.

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