En vertu de la Loi sur les normes du travail (L.N.T.), un salarié victime de harcèlement psychologique peut être indemnisé pour le préjudice subi. L’article 123.15 L.N.T. énumère de façon non exhaustive les ordonnances qui peuvent être rendues par la Commission des relations du travail lorsqu’une plainte pour harcèlement psychologique est accueillie. L’article 123.16 L.N.T. prévoit cependant que les paragraphes 2, 4 et 6 de l’article 123.15 L.N.T. ne s’appliquent pas pour une période au cours de laquelle le salarié a été victime d’une lésion professionnelle, au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, résultant du harcèlement psychologique. Ces paragraphes traitent du pouvoir d’ordonner le paiement d’indemnités pour salaire, pour dommages punitifs et moraux ainsi que pour perte d’emploi. Ces dispositions sont réputées faire partie intégrante de toute convention collective.

L’application de ces articles a donné lieu à un jugement de la Cour supérieure. Le juge Emery a accueilli en partie la requête en révision judiciaire d’une sentence arbitrale (.pdf) de griefs en réduisant la période pendant laquelle le plaignant a droit à des dommages non pécuniaires et exemplaires en raison du harcèlement psychologique.

Chronologie des événements

  • 29 novembre 2005 : le plaignant est placé en arrêt de travail pour cause de dépression. Dans les jours suivants, il dépose une réclamation à la CSST, alléguant que cette condition est due au harcèlement psychologique exercé à son endroit par des collègues.
  • 9 février 2006 : il dépose deux griefs pour harcèlement psychologique.
  • Août 2006 : la CSST rejette sa réclamation.
  • 1er octobre 2008 : la CLP infirme la décision de la CSST et déclare que le plaignant a subi une lésion professionnelle le 29 novembre 2005. La date de consolidation de la lésion est fixée au 9 août 2006.
  • 31 janvier 2013 : l’arbitre accueille les griefs. Il déclare que le plaignant a subi du harcèlement psychologique jusqu’au 9 février 2006. Il ordonne à l’employeur de verser des dommages moraux et punitifs au plaignant et réserve sa compétence afin de déterminer le quantum, le cas échéant.

Selon le juge Emery, même si la CLP a dû tenir compte d’événements antérieurs au 29 novembre 2005 afin de conclure que le plaignant avait subi une lésion professionnelle, ce dernier est devenu inapte au travail en raison de cette lésion seulement à compter de cette date. Le juge précise que cette période d’inaptitude a pris fin à la date de la consolidation de la lésion, soit le 9 août 2006. Telle est, à son avis, la période couverte par la restriction décrite à l’article 123.16 L.N.T.

Le juge estime que l’arbitre n’avait pas le pouvoir de condamner l’employeur pour la période antérieure au 9 février 2006 comme il l’a fait. Sa condamnation ne pouvait donc viser que la période antérieure au 29 novembre 2005.

Appliquant la norme de contrôle de la décision correcte, le juge conclut que l’arbitre a commis une erreur en accordant des dommages-intérêts pour la période comprise entre le 29 novembre 2005 et le 9 février 2006 puisque ce court laps de temps constitue «une période au cours de laquelle le salarié était victime d’une lésion professionnelle» (art. 123.16 L.N.T.).

Références

  • Québec (Procureur général) c. Brodeur (C.S., 2013-11-05), 2013 QCCS 5400, SOQUIJ AZ-51015743
  • Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec et Québec (Ministère de la Sécurité publique)*, (T.A., 2013-01-31), SOQUIJ AZ-50934099
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