La plaignante est éducatrice au service de garde d’une école. Elle a porté plainte pour harcèlement psychologique au travail. Conformément à la «Politique contre toute forme de violence et de harcèlement au travail», adoptée par la commission scolaire, elle a alors remis un résumé écrit des incidents et des faits qu’elle a jugés pertinents et qui, selon elle, constituaient une conduite vexatoire. Sa plainte n’ayant pas été retenue par la commission scolaire, le syndicat a déposé un grief en vertu des articles 123.6 et ss. de la Loi sur les normes du travail, reprochant à l’employeur de ne pas offrir un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique à la plaignante, notamment en raison du comportement fautif de la direction de l’école.

De façon préliminaire, l’employeur a formulé une requête en irrecevabilité du grief. Il a soutenu que, à l’évidence, les événements allégués par la plaignante ne respectaient pas les critères donnant ouverture à son recours ; ils révélaient un exercice normal des droits de la direction et ne constituaient aucunement une conduite vexatoire. Afin d’appuyer sa requête, l’employeur a invoqué une procédure spéciale de traitement des griefs proposée par l’arbitre Hamelin. Cette procédure sommaire, qui vise à permettre un règlement rapide et moins coûteux d’un grief pour harcèlement psychologique, est décrite aux paragraphes 124 et ss. de la sentence arbitrale qu’il a rendue dans Ville de Montréal.

L’arbitre Flynn a rejeté ce moyen de non-recevabilité, estimant que la procédure sommaire ne pouvait être appliquée dans la mesure où le syndicat et la plaignante n’y avaient pas consenti. Elle précise :

[25] Il m’apparait contraire aux intérêts de la justice, de rejeter avant enquête un grief alléguant une situation de harcèlement psychologique à partir d’un document écrit par une personne non avertie en la matière et de surcroît qui ignorait que ledit document servirait d’assise à une requête en irrecevabilité du grief. De plus, dans la présente affaire, la procureure syndicale soutient que depuis le dépôt dudit document d’autres incidents sont survenus. Ainsi, en accueillant la requête patronale, le tribunal priverait la partie syndicale de mettre en preuve des incidents qu’elle prétend fort probants et qui de prime abord ne sont pas prescrits.

[26] L’article 100.5 du Code du travail édicte que «l’arbitre doit donner à l’association accréditée, à l’employeur et au salarié intéressé l’occasion d’être entendus». Le droit à une audition complète est un droit fondamental et seule une procédure bien connue et définie par les parties peut permettre de moduler autrement cette règle de fond. (Caractères gras ajoutés.)

L’arbitre Flynn ajoute que le fait que l’employeur ait, à partir notamment de la version écrite de la plaignante, conclu à l’irrecevabilité de la plainte, ne peut avoir pour effet de priver cette dernière de son droit de bénéficier de la procédure de grief prévue à la convention collective.

Références

  • Montréal (Ville de) et Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montréal (SCFP) (F.L.), (T.A., 2009-02-27), SOQUIJ AZ-50546736, D.T.E. 2009T-375.
  • Association professionnelle du personnel administratif inc. (CSN) et Commission scolaire de Montréal (Karin Rajch), (T.A., 2015-01-28), 2015 QCTA 66, SOQUIJ AZ-51147254. À la date de diffusion, la décision n’avait pas été portée en révision judiciaire.
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