À la suite d’une agression subie par un propriétaire de boulangerie et dont il attribuait la responsabilité à un membre de la communauté italienne, il a congédié une employée d’origine italienne qui occupait un poste de vendeuse en lui signifiant que sa présence était indésirable, compte tenu de son origine ethnique ou nationale. Cet événement est survenu dans le contexte où celui-ci lui tenait, de façon récurrente, des propos désobligeants sur ses caractéristiques physiques et son manque d’intelligence du fait qu’elle était italienne. Il formulait sans cesse des commentaires défavorables à l’égard des Italiens.

Voilà donc les faits ayant mené cette employée à porter plainte pour discrimination en emploi fondée sur les articles 4, 10, 10.1, et 16 de la Charte des droits et libertés de la personne (charte). Il s’agit de l’affaire Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9209-9829 Québec inc.

Le Tribunal des droits de la personne a conclu que l’employeur avait tenu des propos discriminatoires, désobligeants et répétés qui dégradaient son employée et l’associaient à certains membres de la communauté italienne, qu’il avait fait preuve de harcèlement discriminatoire et qu’il avait congédié celle-ci en raison de son origine ethnique ou nationale.

Propos discriminatoires

Le Tribunal a reconnu que le propriétaire de l’entreprise avait tenu de nombreux propos discriminatoires au cours d’une période de plusieurs mois, enfreignant ainsi le droit de la plaignante à des conditions de travail exemptes de discrimination, qui est garanti par l’article 10 de la charte.

De tels propos avaient également porté atteinte à sa dignité en violation de l’article 4 de la charte, soulignant que les remarques de l’employeur avaient eu pour effet, sinon pour objectif, de dévaloriser la plaignante. Au surplus, la vulgarité des propos tenus au sujet des membres de la communauté italienne en général accentuait la pression mise sur celle-ci pour la déconsidérer.

Congédiement à caractère discriminatoire

Par ailleurs, il s’agit d’un congédiement à caractère discriminatoire. À ce sujet, le Tribunal a noté la fin de l’emploi de la plaignante, survenue deux jours après l’agression dont le propriétaire avait été victime et qu’il imputait à des membres de la communauté italienne, les commentaires antérieurs de celui-ci au sujet des Italiens et les propos discriminatoires adressés à la plaignante.

Harcèlement discriminatoire : article 10.1 de la charte

Quant au harcèlement interdit par l’article 10.1 de la charte, le Tribunal a rappelé les éléments constitutifs de cette notion établis par la jurisprudence, notamment Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Immeubles Shirval inc. Cette disposition constitue une prohibition distincte de celle énoncée à l’article 10. S’il y a une chose à se rappeler, c’est que la tolérance de la plaignante pendant un certain temps à l’égard des commentaires vexatoires de son patron ne peut équivaloir à un consentement de sa part.

Et les dommages ?

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse réclamait des dommages moraux de 15 000 $ et des dommages punitifs de 6 000 $. Le Tribunal a jugé qu’une indemnité de 5 000 $ à titre de dommage moral constituait une réparation appropriée pour le préjudice subi en raison du congédiement discriminatoire, et compte tenu de l’absence de preuve de l’effet qu’avait pu produire sur la plaignante les propos discriminatoires et le harcèlement subis.

De plus, une indemnité de 2 000 $ a été accordée à titre de dommages punitifs puisque le propriétaire avait eu clairement l’intention de dégrader la plaignante.

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