La Division des petites créances, qu’est-ce que c’est?

Le nouveau Code de procédure civile, adopté à l’Assemblée nationale le 20 février 2014, vous permet, depuis le 1er janvier 2015, de déposer une réclamation maximale non plus de 7 000 $, mais de 15 000 $ devant la Cour du Québec, Division des petites créances. Les dispositions du nouveau code autres que celles qui augmentent le seuil de compétence sont censées entrer en vigueur le 1er janvier 2016.

Puis-je y avoir accès?

Les recours admissibles sont :

  • Ceux visant une créance maximale de 15 000 $, sans tenir compte des intérêts;
  • Les demandes de résolution, de résiliation ou d’annulation d’un contrat dont la valeur et, le cas échéant, le montant réclamé, n’excèdent pas chacun 15 000 $ (art. 953 du Code de procédure civile (C.P.C.)).

Les recours non admissibles, en vertu de l’article 954 C.P.C., sont :

  • Les recours résultant du bail d’un logement ou d’un terrain visés à l’article 1892 du Code civil du Québec;
  • Les demandes de pension alimentaire;
  • Les recours collectifs;
  • Les poursuites en diffamation;
  • Les demandes soumises par une personne, une société ou une association qui a acquis à titre onéreux la créance d’autrui.

Une personne morale ne peut intenter un recours devant la Division des petites créances que si, en tout temps au cours de la période de 12 mois ayant précédé la demande, elle comptait sous sa direction ou son contrôle au plus 5 personnes liées à elle par contrat de travail (art. 953 C.P.C.).

Dans le nouveau code, ce nombre de personnes liées passera à 10 le 1er janvier 2016 (art. 536 N.C.P.C.).

Si la personne morale ne remplit pas ce critère, elle ne peut adresser sa demande à la Division des petites créances et doit présenter son recours devant le tribunal compétent.

Avez-vous besoin d’un avocat?

La personne physique doit se représenter elle-même devant le tribunal ou donner un mandat écrit à son conjoint, à un parent, à un allié ou à un ami de la représenter (art. 959 C.P.C.).

Pour ce qui est d’une personne morale, elle ne peut être représentée que par un dirigeant ou par une autre personne à son seul service et liée à elle par un contrat de travail (art. 959 C.P.C.).

Le nouveau code précise, à son article 542, que la personne qui représente la personne morale ne saurait être un avocat. Malgré cette interdiction d’être représenté par un avocat, rien n’empêche votre entreprise d’en consulter un afin de préparer votre dossier.

Puis-je réclamer les honoraires payés à mon avocat (honoraires extrajudiciaires)?

L’arrêt phare en la matière est Viel c. Entreprises immobilières du terroir ltée, qui nous enseigne qu’une partie ne peut, en règle générale, être compensée pour les honoraires payés à ses avocats pour faire valoir ses droits.

Cet arrêt de la Cour d’appel établit, par contre, que les honoraires extrajudiciaires peuvent être accordés à titre de dommages-intérêts dans le cas où la partie adverse abuse de son droit d’ester en justice. L’abus du droit d’ester en justice y est défini ainsi : « […] une faute commise à l’occasion d’un recours judiciaire. C’est le cas où la contestation judiciaire est, au départ, de mauvaise foi, soit en demande ou en défense. Ce sera encore le cas lorsqu’une partie de mauvaise foi, multiplie les procédures, poursuit inutilement et abusivement un débat judiciaire » (Viel, paragr. 75).

Nous avons recensé quelques décisions de la Cour du Québec, Division des petites créances, où le remboursement des honoraires extrajudiciaires a été accordé en application de l’arrêt Viel : Lavigne c. Poirier, Bérard c. Québec (Procureur général), St-Onge c. Syndicat des employées et employés de métiers d’Hydro-Québec, section locale 1500 SCFP (FTQ) et Audet c. Dynamique des handicapés de l’Estrie inc.

Postérieurement à l’arrêt Viel, le législateur a adopté l’article 54.1 C.P.C., qui stipule que les tribunaux peuvent à tout moment déclarer qu’une demande en justice ou un acte de procédure sont abusifs.

L’article 54.4 C.P.C. permet alors au juge d’ordonner le paiement des honoraires extrajudiciaires à titre de dommages-intérêts lorsqu’il se prononce sur le caractère abusif d’une demande en justice ou d’un acte de procédure.

Quelques décisions de la Division des petites créances ont accordé, aux termes de cet article, le remboursement des honoraires extrajudiciaires aux parties poursuivies en raison de l’abus de procédure commis par la partie demanderesse (Leduc c. Immeubles Jacques Robitaille inc. (Hôtel Québec), Gaudreault c. Syndicat de la copropriété Le Relais Seigneurial et Du Berger c. CAA-Québec habitation inspection).

Enfin, l’article 342 du nouveau Code de procédure civile stipule ce qui suit :

« Le tribunal peut, après avoir entendu les parties, sanctionner les manquements importants constatés dans le déroulement de l’instance en ordonnant à l’une d’elles, à titre de frais de justice, de verser à une autre partie, selon ce qu’il estime juste et raisonnable, une compensation pour le paiement des honoraires professionnels de son avocat ou, si cette autre partie n’est pas représentée par avocat, une compensation pour le temps consacré à l’affaire et le travail effectué. »

Cet article semble ouvrir davantage la porte au remboursement d’une partie des honoraires engagés pour vous défendre, mais il sera intéressant de voir comment les juges interpréteront la notion de « manquements importants constatés dans le déroulement de l’instance ».

J’ai eu gain de cause, mais je ne suis toujours pas payé…

Si la partie adverse a été condamnée à vous verser une somme d’argent par un jugement de la Cour du Québec, Division des petites créances, elle a 30 jours à la suite du jugement pour s’exécuter (10 jours s’il n’y a pas eu de contestation).

Si elle omet de payer dans les délais prévus, vous pouvez alors entreprendre une procédure en exécution forcée (saisie). Il est alors possible de consulter le greffier de la Division des petites créances, un avocat ou un huissier pour savoir comment procéder.

Références

  • Viel c. Entreprises immobilières du terroir ltée(C.A., 2002-05-082002-10-22), SOQUIJ AZ-50124437, J.E. 2002-937, [2002] R.J.Q. 1262, [2002] R.D.I. 241 (rés.), [2002] R.R.A. 317 (rés.)
  • Lavigne c. Poirier(C.Q., 2008-09-03), 2008 QCCQ 7458, SOQUIJ AZ-50510985, J.E. 2008-1915, [2008] R.R.A. 1139 (rés.) 
  • Bérard c. Québec (Procureur général), (C.Q., 2006-11-14), 2006 QCCQ 12351, SOQUIJ AZ-50400578, J.E. 2007-114, D.F.Q.E. 2007F-5, [2007] R.D.F.Q. 192 (rés.)
  • St-Onge c. Syndicat des employées et employés de métiers d’Hydro-Québec, section locale 1500 SCFP (FTQ)*(C.Q., 2008-07-24), 2008 QCCQ 6631, SOQUIJ AZ-50505735, D.T.E. 2008T-722
  • Audet c. Dynamique des handicapés de l’Estrie inc.(C.Q., 2007-12-28), 2007 QCCQ 14485, SOQUIJ AZ-50467406, J.E. 2008-347, D.T.E. 2008T-139, [2008] R.J.D.T. 173
  • Leduc c. Immeubles Jacques Robitaille inc. (Hôtel Québec), (C.Q., 2015-05-08), 2015 QCCQ 3716, SOQUIJ AZ-51175053 
  • Gaudreault c. Syndicat de la copropriété Le Relais Seigneurial(C.Q., 2014-10-24), 2014 QCCQ 11086, SOQUIJ AZ-51126530
  • Du Berger c. CAA-Québec habitation inspection (C.Q., 2010-08-29), 2010 QCCQ 20250, SOQUIJ AZ-50782949 
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