Une décision en matière de droits et libertés de la personne, rendue cet été, est arrivée à point en cette période d’embauche qui s’amorce. Il s’agit de l’affaire Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Bathium Canada inc., où la question de l’examen médical préembauche est au cœur du litige.

Le Tribunal des droits de la personne devait déterminer si l’administration de l’examen médical préembauche par l’employeur sans offre formelle d’embauche conditionnelle à l’examen médical avait compromis le droit d’un candidat à un processus d’embauche exempt de discrimination, et ce, en violation des articles 10 et 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne.

C’est essentiellement la question qui nous intéresse puisque les parties ont procédé à plusieurs admissions, dont celle selon laquelle le refus d’embauche n’était pas relié aux résultats de l’examen médical ni à l’état de santé du postulant.

Examen médical préembauche : avant ou après une offre d’emploi ?

Il s’agissait d’un enjeu important pour tous les employeurs.

La position de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse clairement défendue depuis longtemps, et selon laquelle tout employeur doit présenter une offre d’emploi conditionnelle à la réussite de l’examen médical avant d’exiger du candidat qu’il se soumette à celui-ci, n’a pas été retenue par le Tribunal.

Celui-ci a rejeté l’interprétation large et libérale proposée par la Commission après avoir examiné la législation sur les droits de la personne d’autres provinces ainsi que le Journal des débats relatifs aux travaux parlementaires.

Ainsi, le Tribunal a conclu que l’administration d’un examen médical préembauche par l’employeur sans offre officielle d’emploi conditionnelle à la réussite d’un tel examen ne compromet pas le droit du candidat à un processus d’embauche exempt de discrimination protégé par les articles 10 et 18.1 de la charte.

Maintenant, il est à propos d’indiquer ce que le Tribunal a rappelé au sujet de la portée de la protection offerte par l’article 18.1 de la charte.

Entrevue menée par un tiers

La collecte de renseignements par un professionnel de la santé, un médecin en l’espèce, fait partie du processus d’entrevue et de la collecte d’informations visée par l’article 18.1 de la charte. Le fait que l’entrevue ait été effectuée par le biais d’un fournisseur de services ne change rien quant à la responsabilité de l’employeur à l’égard des fautes ou contraventions à la législation applicable.

Poser des questions portant sur l’état de santé d’un postulant : oui ou non ?

Le Tribunal rappelle que l’article 18.1 de la charte prohibe la discrimination dans le processus d’embauche, mais il n’interdit pas de poser des questions portant sur l’état de santé d’un postulant. L’employeur peut poser de telles questions. Toutefois, il doit les formuler de façon à respecter leur caractère non discriminatoire, donc à obtenir des réponses portant exclusivement sur les «aptitudes ou qualités requises par un emploi» au sens de l’article 20 de la charte. Le Tribunal a notamment fait référence à l’affaire Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur-du- Québec (SIIIACQ) c. Bolduc.

Dans notre affaire, Bathium Canada, des renseignements médicaux «superflus» ont été demandés par la clinique que l’employeur avait mandatée. Cette collecte de même que la mention «obésité morbide» paraissant sur le certificat médical et non reliée aux exigences du poste ont entraîné sa responsabilité. Les dommages en découlant ont été évalués à 2 000 $.

Références

  • Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Bathium Canada inc. (T.D.P.Q., 2015-06-29), 2015 QCTDP 13, SOQUIJ AZ-51200472.
  • Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Coeur-du-Québec (SIIIACQ) c. Bolduc (C.S., 2012-11-12), 2012 QCCS 6193, SOQUIJ AZ-50920670, 2013EXP-162, 2013EXPT-79, J.E. 2013-87, D.T.E. 2013T-26.
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