Dans Droit de la famille — 161337, le juge Serge Gaudet, de la Cour supérieure, devait notamment décider, dans le contexte de procédures en divorce, si les droits d’accès d’un père auprès de ses enfants pouvaient être exercés par les grands-parents paternels dans l’éventualité où celui-ci ne pourrait les exercer lui-même

Les parties dans cette affaire, qui sont originaires du Bénin, sont mariées et ont trois enfants mineurs. En 2013, ils conviennent du fait que la mère ira passer quelque temps au Bénin, auprès de sa famille, avec les enfants. Ces derniers ne reviennent toutefois jamais au Québec et, à la suite du dépôt de procédures en divorce par le père, la famille maternelle entrave ses accès aux enfants et coupe les ponts avec les grands-parents paternels, qui résident également au Bénin. Bien que le père se dise d’accord pour que la garde des enfants soit accordée à la mère, n’étant pas en mesure de s’en occuper lui-même au Québec, il demande que ses droits d’accès puissent être exercés par ses parents lorsqu’il ne pourra les exercer lui-même.

Selon le juge Gaudet, le père ne peut être autorisé à déléguer ses droits d’accès aux grands-parents :

[56]     D’une part, selon le Tribunal, les droits d’accès sont des droits d’une nature purement personnelle, qui sont intimement rattachés à la personne qui peut les exercer et celle-ci ne peut ni les céder, ni les déléguer à autrui. Le Tribunal souligne à cet égard que la Cour d’appel a déjà remplacé une conclusion qui permettait à un père de déléguer l’exercice du droit d’accès à un membre de sa famille par une conclusion beaucoup plus limitée qui permettait seulement de désigner un tiers pour aller chercher et reconduire les enfants lorsque le père ne pouvait le faire lui-même .

[57]     D’autre part, accorder cette demande aurait pour effet de conférer indirectement aux parents de Monsieur des droits d’accès. Or, ceux-ci ne sont pas intervenus aux procédures afin d’obtenir des droits d’accès aux enfants et Monsieur ne peut plaider en leur nom, nul ne pouvant plaider sous le nom ou au bénéfice d’autrui. D’ailleurs, et cela rejoint ce qui vient d’être mentionné, selon le paragraphe 16 (3) de la Loi sur le Divorce, une personne autre qu’un ex-époux doit obtenir l’autorisation du Tribunal avant de pouvoir faire une demande de garde ou d’accès à un enfant.

Il appartiendra donc au père d’exercer ses droits d’accès auprès de ses enfants au Bénin. Il y a d’ailleurs lieu de noter à cet égard que le juge Gaudet tient compte du coût, qu’il qualifie d’«anormalement élevé», des frais de transport reliés à l’exercice de ces droits d’accès — deux voyages aller-retour par année représenteront une dépense de 4 000 $ pour le père, dont le revenu brut est de 36 000 $ — et conclut à l’existence de difficultés excessives pour ce dernier; il réduit en conséquence la pension alimentaire payable de 2 000 $ sur une base annuelle.

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