Source : Wikimedia

Dans un reportage de l’émission La Facture diffusé le 13 décembre dernier, on apprenait que le fléau de la mérule pleureuse prenait de l’ampleur au Québec. L’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) considère d’ailleurs ce champignon comme le «cancer des maisons». Dévastateur et difficile à détecter, il s’attaque aux éléments de bois et contraint souvent les propriétaires à démolir leur maison.

Pour l’instant, seulement deux cas d’immeuble infesté par la mérule pleureuse ont abouti devant les tribunaux québécois. Le premier est en matière de vices cachés tandis que le deuxième touche à l’obligation de délivrance du vendeur. 

Dans Magnan c. Veillette, les demandeurs avaient acheté une résidence construite 30 ans auparavant. L’année suivante, à la fonte des neiges, ils ont subi une infiltration d’eau au sous-sol. Afin d’assécher le plancher, ils ont fait appel à une entreprise de nettoyage qui a remarqué la présence de mérule pleureuse à plusieurs endroits dans le sous-plancher du sous-sol. Les demandeurs ont dénoncé ce problème au vendeur et ils ont procédé à des travaux correctifs (démolition du faux plancher, lavage du plancher de béton avec un antifongique et coulage d’une nouvelle dalle par-dessus). Invoquant la garantie de qualité pour les problèmes constatés au sous-sol (mais également le vice de consentement pour l’état des fenêtres et de la toiture), les acheteurs ont réclamé au vendeur une diminution du prix de vente de 27 290 $ ainsi que des dommages-intérêts de 5 000 $. Le juge a conclu que la pourriture de la structure du plancher du sous-sol ainsi que la contamination importante à la mérule pleureuse causées par une forte humidité et par l’eau constituaient des vice cachés. À ce titre, et en tenant compte de la dépréciation, il a accordé 9 785 $ aux acheteurs pour le coût des travaux correctifs

Dans Robichaud c. Lemay, c’est une indemnité beaucoup plus substantielle qui a été accordée aux acheteurs d’un duplex. Ils savaient, lors de l’achat, que d’importants travaux visant à corriger un problème d’infiltration d’eau et de moisissures avaient été effectués quelques mois auparavant. Persuadés que tout était réglé, ils ont procédé à la transaction. Or, moins de trois ans plus tard, un locataire a constaté que des champignons avaient de nouveau transpercé le plancher de la chambre du logement situé au rez-de-chaussée. Une expertise a révélé qu’il s’agissait de mérule pleureuse, une espèce de champignon particulièrement envahissante et susceptible d’attaquer l’ensemble de la structure de l’immeuble. Les acheteurs ont donc réclamé 91 216 $ au vendeur (ainsi qu’à l’entreprise ayant effectué les travaux correctifs), notamment pour les travaux de décontamination et de reconstruction ainsi que pour les inconvénients subis. Le juge a condamné le vendeur à leur verser 81 219 $. Il a conclu qu’ils avaient été rassurés par la déclaration du vendeur, qui avait garanti que les travaux avaient corrigé la situation. C’est sur la foi de cet engagement de procéder à la décontamination qu’ils ont conclu la transaction. Le juge a donc retenu que le vendeur n’avait pas livré aux acheteurs un immeuble conforme à ce qui avait été convenu. Même si les travaux correctifs et de décontamination exécutés avant l’achat étaient déficients (l’entreprise n’ayant pas appliqué un protocole de décontamination précis et rigoureux), c’est le vendeur qui a dû supporter l’entière responsabilité des dommages.

Références

  • Magnan c. Veillette (C.Q., 2011-11-14), 2011 QCCQ 13667, SOQUIJ AZ-50805301.
  • Robichaud c. Lemay (C.S., 2013-11-21), 2013 QCCS 6046, SOQUIJ AZ-51024157, 2014EXP-84.
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