Un parent qui connaît une augmentation substantielle de ses revenus peut-il invoquer le fait que la pension alimentaire qu’il paie déjà est suffisante pour satisfaire les besoins de ses enfants afin de démontrer que la pension exigible en fonction de son nouveau revenu ne serait pas indiquée et qu’il n’y aurait donc pas lieu d’augmenter la pension alimentaire payable? Le juge François P. Duprat a récemment été saisi de cette question dans un contexte où les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants trouvaient application, dans Droit de la famille – 172652.

Les lignes directrices sont applicables lorsque l’un des parents n’était pas domicilié au Québec et elles ont notamment pour objectif de permettre aux enfants de parents mariés de continuer de bénéficier des ressources financières de leurs parents après la séparation. L’article 4 des lignes directrices crée une présomption selon laquelle la pension alimentaire exigible lorsque le parent payeur a un revenu supérieur à 150 000 $ est indiquée. Le parent qui conteste la pension qu’il devrait payer en vertu des lignes directrices doit renverser cette présomption et le tribunal appelé à statuer sur le caractère indiqué ou non de la pension alimentaire devra, dans son examen, tenir compte notamment des ressources, des besoins et de la situation des enfants ainsi que de la situation financière des parents.

Dans Droit de la famille – 172652, le père verse une pension alimentaire mensuelle de 4 321 $ au bénéfice de ses deux enfants. Ses revenus ont connu une hausse appréciable dans les dernières années, de sorte que, si les lignes directrices avaient été appliquées, les enfants auraient bénéficié d’une pension alimentaire mensuelle de 7 611 $ en 2016 et de 6 173 $ en 2017. La mère demande un rajustement à la hausse de la pension alimentaire pour tenir compte de ces changements dans la situation du père. Ce dernier fait toutefois valoir que les besoins des enfants n’ont pas changé au fil des années, que la pension alimentaire de 4 321 $ par mois a toujours permis de répondre à l’ensemble de ces besoins et que la pension devrait permettre le maintien du train de vie des enfants et non pas une égalisation du train de vie chez chacun des parents.

Le juge Duprat ne retient pas la position du père, indiquant notamment que la mère est en mesure de joindre les deux bouts, certes, mais que cela ne permet pas nécessairement de conclure que les besoins des enfants sont satisfaits. Ainsi, la capacité de la mère de gérer son budget actuel n’exclut pas l’application des lignes directrices, dont l’objectif est de permettre aux enfants de bénéficier de la capacité financière de leurs parents. La pension alimentaire pour enfants est donc modifiée conformément aux lignes directrices pour tenir compte des revenus réels du père.

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