Des cas inquiétants

Tout dernièrement, La Presse a publié un dossier dans lequel les journalistes ont recensé pas moins de 200 personnes âgées et vulnérables décédées à la suite d’accidents médicaux dans des résidences qui les hébergeaient. Il est difficile de ne pas être révoltés par les soins réservés à nos aînés dans ces affaires.

Par ailleurs, on a souvent la fausse impression que les services sont supérieurs dans des résidences privées pour aînés parce qu’il faut payer cher pour y être hébergé. Pourtant, la situation peut être aussi pénible dans des établissements privés. Mentionnons notamment un cas récent où le certificat de conformité d’une telle résidence a été révoqué :

Y.A.

À diverses occasions, l’exploitante ou ses employés ont été responsables d’incidents préoccupants concernant l’administration des médicaments aux résidents. À quelques reprises, du personnel non qualifié distribuait les médicaments.

Il y a aussi eu non-respect du plan de services touchant notamment l’hygiène personnelle de certains résidents. Les repas fournis ne suivaient pas le Guide alimentaire canadien. Elle n’avait pas un personnel en place pour assurer les besoins des usagers. Les résidents ont été laissés à eux-mêmes dans plusieurs situations.

Même si l’exploitante alléguait avoir mis en place une procédure à suivre en cas d’urgence, les gens qu’elle laissait à la résidence pour surveiller les usagers ne savaient pas comment agir en cas de danger pour l’intégrité de ces derniers ou n’appliquaient pas cette procédure. Notamment, c’est une résidente qui a dû appeler les services d’urgence lorsqu’une autre usagère a eu besoin d’aide médicale.

L’exploitante n’a pas non plus adopté un code d’éthique précisant les pratiques et les conduites attendues à l’égard des résidents. Il y a eu violence verbale de sa part et de celle et de ses employés. De plus, des employés ont montré des comportements inappropriés envers quelques résidents.

À l’occasion d’une intervention à la résidence, un ambulancier a constaté que l’exploitante invectivait une résidente qui avait communiqué avec le service d’urgence afin qu’il intervienne auprès d’une autre résidente alors en difficulté et laissée sans aide. Elle n’a pas respecté ses obligations légales pendant toute la période de la validité du certificat. Certains des manquements observés risquaient de mettre en péril la santé et la sécurité des résidents, notamment ceux qui touchent le seuil minimal de surveillance, l’administration des médicaments et les soins invasifs d’assistance aux activités de la vie quotidienne.

Quel recours pour le résident?

Un mécanisme de plainte est prévu au chapitre III (art. 29 à 71) de la Loi sur les services de santé et les services sociaux si la qualité des services et des soins n’est pas au rendez-vous dans les ressources intermédiaires et les CHSLD qui prennent soin des personnes vulnérables. Ensuite, si les conclusions de l’enquête du Commissaire aux plaintes et à la qualité des services ne nous satisfont pas, il faut s’adresser au Protecteur du citoyen. Il va sans dire que tout cela prend du temps et de l’énergie, sans oublier que plusieurs usagers et leur famille ne connaissent pas leurs droits.

Cas vécu d’un parent en hébergement

Depuis le mois de mai, ma mère est dans une maison qui n’est pas adaptée à son état. Au départ, son état requérait une unité prothétique, soit un lieu où il est notamment interdit de sortir à l’extérieur en raison de l’errance ou du risque de fugue de l’usager. Quelques semaines après son entrée, son dossier a été réévalué et elle n’aurait plus besoin de ce type d’hébergement très restrictif. De plus, lorsqu’elle était à l’hôpital, le personnel a rapidement eu besoin du lit qu’elle occupait. Nous avons donc pris la première place qu’il y avait, située à 75 kilomètres de son lieu de résidence habituel. C’est pratique lorsque les enfants, qui habitent en ville, n’ont pas de voiture !

L’endroit est par ailleurs délabré et j’ai dû faire une plainte officielle au Centre intégré de santé et services sociaux responsable de cette ressource pour que la situation soit prise au sérieux. Il paraîtrait que des rénovations sont prévues pour le bien des résidents mais, honnêtement, ce n’est pas ce qui m’importe le plus à l’heure actuelle.

L’important serait qu’elle soit transférée à une résidence proche de ses enfants et de ses amis, où elle pourra avoir des conversations avec d’autres résidents et s’asseoir dehors si elle le souhaite. Or, malgré nos nombreuses demandes et l’expression de notre détresse, la seule réponse obtenue est : « Vous êtes sur la liste d’attente ».

Comment comprendre que la réponse « vous êtes sur la liste d’attente » soit satisfaisante pour les autorités sans qu’aucune disposition soit prise pour aider les usagers et les familles en détresse devant une telle situation ? La situation de ma famille n’est pas unique et il y en a d’autres autour de moi. Et c’est sans compter les personnes âgées qui n’ont pas de famille pour les défendre et se soucier de leur bien-être.

Un changement sociétal nécessaire?

Ne serait-il pas temps que l’on prenne un moment pour réfléchir à la question? Que voulons-nous pour nos parents et pour nous-mêmes? Il y a de plus en plus de personnes âgées au Québec. Selon les projections, le quart des Québécois seront âgés de 65 ans ou plus en 2031, et près du tiers en 2061. À l’heure actuelle, 564 000 Canadiens sont atteints d’une maladie cognitive; d’ici 15 ans, ce chiffre atteindra 937 000. Déjà, il y a pénurie de préposés aux bénéficiaires dans nos établissements. Quelle sera la solution pour l’avenir? Un organe gouvernemental dédié aux aînés, comparable à la Direction de la protection de la jeunesse?

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