Le professionnel de la santé qui a charge de la victime d’une lésion professionnelle doit fournir certains rapports médicaux à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).
Dans une récente affaire entendue par le Tribunal administratif du travail (TAT), la travailleuse contestait une décision que la CNESST avait rendue en se basant sur les conclusions énoncées par son médecin en réponse à une demande de précision formulée par cet organisme.
Ces conclusions se trouvaient dans un document intitulé «télécopie médicale». Le médecin y indiquait que l’entorse lombaire de la travailleuse était consolidée, sans préciser à quelle date, et il ajoutait que cette dernière ne conservait aucune séquelle permanente.
Sur la base de ces informations, la CNESST a notamment conclu que la travailleuse était capable d’exercer son emploi et elle a mis fin au versement de son indemnité de remplacement du revenu.
La travailleuse prétendait que la CNESST aurait dû exiger que son médecin remplisse un rapport final, prévu à l’article 203 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP), sur le formulaire prescrit par cet organisme.
Le TAT a donné raison à la travailleuse. Il a retenu que, même si, dans certains cas, l’omission d’utiliser le formulaire de rapport final n’avait pas été déterminante, la démarche adoptée dans le dossier de la travailleuse avait porté atteinte aux droits de cette dernière.
L’importance du rapport final
Le document intitulé «télécopie médicale» que le médecin de la travailleuse avait transmis à la CNESST en réponse à la demande de précision n’était pas daté ni signé. Par ailleurs, aucune date de visite médicale n’y était mentionnée. De l’avis du TAT, un tel document ne ressemble en rien au rapport final requis par la loi, lequel doit notamment être signé.
La décision rendue par le TAT est intéressante en ce que celui-ci y énonce les raisons pour lesquelles il est important d’utiliser le formulaire prescrit par la CNESST, auquel l’article 203 LATMP fait d’ailleurs expressément référence.
L’utilisation de ce formulaire:
- Permet d’éviter les ambiguïtés;
- Oblige le médecin à avoir conscience de la gravité de l’acte médical qu’il accomplit;
- Officialise les conclusions du médecin.
Le TAT souligne en outre que:
- L’obligation d’indiquer la date d’une visite médicale sur le formulaire sensibilise le médecin à la nécessité de rencontrer le travailleur avant d’émettre ses conclusions;
- En signant le formulaire, le médecin atteste avoir informé sans délai le travailleur du contenu de son rapport, ce qui correspond à une exigence prévue à l’article 203 LATMP.
[Nos caractères gras.]
Éviter les «raccourcis» en matière d’évaluation médicale
Les conclusions du professionnel de la santé qui a charge en ce qui a trait aux questions d’ordre médical sur lesquelles il est appelé à se prononcer ont des conséquences directes sur les droits de la victime d’une lésion professionnelle, laquelle ne peut les contester. La CNESST est liée par les conclusions de ce professionnel, sauf si elle décide de les contester selon la procédure prévue par la loi, et cette possibilité est également offerte à l’employeur.
Comme le souligne le TAT, dans un tel contexte, il est nécessaire d’«éviter les raccourcis lorsqu’il s’agit de la procédure d’évaluation médicale» (paragr. 26).
Les effets négatifs de tels «raccourcis» sont loin d’être abstraits. Ils s’inscriront dans le quotidien de la victime d’une lésion professionnelle.
Dans le présent cas, la CNESST ne pouvait se considérer comme liée par les réponses du médecin de la travailleuse à sa demande de précision. Elle aurait dû demander à ce médecin de produire un rapport final, «de manière à ce que les choses soient claires» (paragr. 31).
Contrairement à ce que la CNESST avait décidé, le TAT a déclaré que l’entorse lombaire n’était pas consolidée à la date retenue par cet organisme, de sorte que la travailleuse avait toujours droit aux prestations prévues par la loi.
Les auteurs du Blogue ne peuvent donner d'opinion ni de conseil juridique relativement aux situations personnelles des lecteurs.
Consultez un avocat ou un notaire pour obtenir des réponses appropriées à votre situation : visitez la Boussole juridique pour trouver des ressources gratuites ou à faible coût.