Il y aura bientôt un an que les premières ordonnances d’injonction ont été rendues dans le contexte de la grève étudiante du printemps 2012 (voir mon premier billet sur le sujet). Plusieurs n’ayant pas été respectées, des requêtes pour outrage au tribunal ont été déposées. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts : une loi spéciale a été adoptée, un nouveau gouvernement a été élu et les cours ont repris dans les cégeps et les universités. Qu’est-il donc advenu de ces requêtes pour outrage au tribunal? 

Dans Lessard c. Cégep de Sherbrooke, trois étudiants avaient présenté une requête pour outrage au tribunal à la suite du non-respect d’une ordonnance d’injonction provisoire ordonnant au cégep d’offrir ses cours de façon normale et interdisant à l’association étudiante d’empêcher l’accès aux locaux. N’ayant plus les ressources financières pour payer un avocat et continuer les procédures, les demandeurs se sont tout de même dits prêts à collaborer et à témoigner si le tribunal entendait continuer les procédures d’outrage au tribunal.

Dans les circonstances très particulières du dossier, le juge a conclu qu’il pouvait poursuivre la procédure d’outrage au tribunal malgré la fin du conflit ou même si une partie n’avait pas les moyens de continuer les procédures, mais qu’il n’était pas opportun de le faire. Selon lui, les injonctions ne sont plus nécessaires depuis l’entrée en vigueur de la Loi permettant aux étudiants de recevoir l’enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu’ils fréquentent (.pdf) (le projet de loi 78) :

[40]        Même si le tribunal peut continuer les procédures pour outrage au tribunal et même s’il est possible au tribunal de demander au Procureur général d’intervenir pour continuer ces procédures, le tribunal ne croit pas qu’il soit opportun de le faire, dans le cas très particulier dont il est saisi.

[41]        Agir ainsi, placerait, de l’avis du tribunal, le Procureur général dans une position délicate qui ne serait pas nécessairement souhaitable.

[42]        Le législateur a tenté par le projet de loi 78 de répondre aux préoccupations, partagées par plusieurs, concernant l’impossibilité pour plusieurs étudiants de terminer leurs sessions d’hiver.

[43]        Bien que les jugements d’injonction tentaient de minimiser les dommages pour les demandeurs et assurer leurs droits à l’instruction, le projet de loi 78 a mis fin à la nécessité des injonctions.

[44]        Puisque les demandeurs ne désirent pas continuer eux-mêmes les procédures, le tribunal ne le fera pas de son propre chef même s’il est possible de le faire.

Ainsi s’achève peut-être la saga des grèves étudiantes…

Référence

 Lessard c. Cégep de Sherbrooke (C.S., 2013-03-13), 2013 QCCS 1037, SOQUIJ AZ-50945973

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