Avec 404,8 millions de déplacements effectués par la Société de transport de Montréal (STM), il est presque inévitable que des incidents surviennent. Dans ce billet, je vous ferai part de quelques cas où des usagers ont invoqué la responsabilité du transporteur pour tenter d’obtenir une indemnité de celui-ci.

Dommages corporels à la suite d’une tentative de suicide

Dans Lahjouji c. Société de transport de Montréal, le demandeur réclamait à la STM des dommages-intérêts de plus de trois millions de dollars à la suite d’un accident survenu dans le métro. Celui-ci a subi un grave traumatisme crânien après avoir été heurté par une voiture du métro alors qu’il se trouvait sur le quai. Il reprochait à la STM d’avoir manqué à l’obligation de sécurité et à l’obligation de résultat auxquelles elle était tenue. Or, la juge a rejeté sa requête et a retenu que la STM n’était pas dans l’exécution d’un contrat de transport au moment de l’accident, car celui-ci était survenu avant l’embarquement, soit avant le début du contrat au sens de l’article 2036 du Code civil du Québec. Elle a également conclu que l’accident avait été causé par le demandeur, lequel avait effectué des enjambées en direction de la voiture du métro qui entrait dans la station. Le geste du demandeur relevait donc de la témérité ou d’un désir suicidaire, et la STM pouvait invoquer la faute ou l’état de santé de celui-ci pour écarter sa responsabilité de transporteur. De plus, le demandeur n’a pas démontré que la STM n’avait pas pris tous les moyens raisonnables pour permettre aux passagers d’accéder à la rame et à la station de métro de façon sécuritaire. En effet, il n’a pas été prouvé que la conduite du métro en mode automatique était dangereuse, que celui-ci était arrivé à grande vitesse dans la station ni que l’absence d’un obstacle physique à l’accès au quai constituait une faute.

Agression par un usager du transport en commun

Dans une autre affaire mettant également en cause les transports en commun montréalais (Étienne c. Montréal (Société de transport de la Communauté urbaine de), le demandeur ayant été agressé et grièvement blessé par un groupe de jeunes «skinheads» en sortant du métro à la station Pie-IX, il réclamait des dommages-intérêts de 35 000 $ à la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal. La juge a conclu que cette attaque imprévisible d’un usager du métro par un groupe de jeunes constituait un cas de force majeure permettant au transporteur de se dégager de toute responsabilité. En effet, cette station de métro n’était pas un endroit à problèmes lors de l’incident et rien ne pouvait laisser croire qu’un tel événement y surviendrait. Une augmentation de la surveillance n’était pas justifiée.

Chute

Certains usagers qui ont subi des blessures en raison d’une chute à l’occasion d’un transport en commun ont également cherché à obtenir compensation. Dans Lamothe c. Montréal (Société de transport de), une dame de 62 ans ayant fait une chute en butant contre la chaîne d’un trottoir lorsqu’elle descendait d’un autobus a obtenu des dommages-intérêts de 5 250 $. Le juge a retenu que la STM avait manqué à son obligation contractuelle de sécurité car, pour sortir de l’autobus, la passagère devait soit poser le pied dans l’espace entre le marchepied et le trottoir ou enjamber cet espace. L’emplacement de l’autobus entraînait donc des conséquences risquées pour sa sécurité, et cette situation constituait un piège.

Par ailleurs, tout usager du métro de Montréal a dû, un jour ou l’autre, se battre contre les «courants d’air» à l’entrée de certaines stations, lesquels rendent parfois difficile l’ouverture des portes. Ce phénomène normal, appelé «effet piston», est causé par les mouvements d’air lors du déplacement des trains dans le tunnel, lesquels se propagent jusqu’aux portes de sortie. Dans une récente affaire (Gagné-Arel c. Société de transport de Montréal), une femme de 77 ans a subi des blessures à l’épaule gauche lorsqu’elle a été projetée à l’extérieur de la station de métro Monk par le courant d’air. Elle réclamait des dommages-intérêts de 7 000 $, mais la juge a conclu que la STM n’avait pas commis de faute dans l’aménagement des portes de la station de métro. Toutefois, elle a prié la STM de fournir un plus grand effort pour faciliter le transport par métro, plus particulièrement des personnes âgées ou handicapées.

Même s’il met en œuvre des mécanismes pour réduire les conséquences de ces mouvements d’air, le transporteur doit également éviter de placer des obstacles sur le trajet des usagers qui pourraient être soumis à l’effet piston. Ainsi, dans Morais-Benoît c. Montréal (Société de transport de la Communauté urbaine de), la demanderesse a obtenu une indemnité de 28 000 $ après s’être fracturé la hanche lors d’une chute causée par l’effet piston, laquelle l’a projetée sur un banc de béton situé à proximité de l’entrée.

En ce qui concerne les blessures causées par un arrêt brusque du métro, la juge, dans Richard c. Société de transport de Montréal, a rappelé que, selon la jurisprudence constante, un transporteur ne peut être tenu responsable que si l’accident est causé par une défectuosité du véhicule ou par une faute du conducteur, ce qui n’avait pas été démontré en l’espèce.

Respect des horaires du service d’autobus

Enfin, dans Cooperstock c. Société des transports de Montréal, la juge a rappelé au demandeur que l’obligation de résultat qui incombe à la STM est de transporter les usagers d’un arrêt à l’autre, et que le respect de l’horaire constitue une obligation de moyens. Ainsi, cette dernière ne peut garantir la ponctualité absolue de son service d’autobus.

Références

  • Lahjouji c. Société de transport de Montréal 2012 QCCS 3450, SOQUIJ AZ-50875650, 2012EXP-2978, J.E. 2012-1593
  • Étienne c. Montréal (Société de transport de la Communauté urbaine de (C.S., 2002-11-29), SOQUIJ AZ-50158850, J.E. 2003-527, [2003] R.R.A. 312 (rés.))
  • Lamothe c. Montréal (Société de transport de) (C.Q., 2004-03-18), SOQUIJ AZ-50228985, B.E. 2004BE-830)
  • Gagné-Arel c. Société de transport de Montréal  (C.Q., 2013-02-18), 2013 QCCQ 1479, SOQUIJ AZ-50942798, 2013EXP-1021)
  • Morais-Benoît c. Montréal (Société de transport de la Communauté urbaine de) (C.S., 1997-01-24), SOQUIJ AZ-97021188, J.E. 97-560, [1997] R.J.Q. 1006, [1997] R.R.A. 554 (rés.))
  • Richard c. Société de transport de Montréal (C.Q., 2011-08-30), 2011 QCCQ 18327, SOQUIJ AZ-50846164
  • Cooperstock c. Société des transports de Montréal (C.Q., 2013-03-11), 2013 QCCQ 1859, SOQUIJ AZ-50946430
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