«On ne fait pas de politique avec de la morale, mais on n’en fait pas davantage sans.»
André Malraux

On pourrait traduire cette citation de manière plus prosaïque, comme l’a fait récemment un témoin expert appelé à témoigner devant la Commission municipale du Québec (CMQ) alors que celle-ci se penchait sur l’administration de la municipalité de Lamarche1 :

Ça se pourrait-tu que il y ait des personnes qui soient pas faites pour être élues […] la question qui se pose, c’est «c’est-tu leur place?»

À la lumière des récents scandales ayant ébranlé le monde municipal et des taux de participation habituellement faméliques aux élections municipales, ces citations donnent matière à réflexion.

L’enquête de la CMQ sur la municipalité de Lamarche portait sur des faits s’étant produits d’avril 2007 à février 2011. Depuis, les municipalités québécoises se sont dotées d’un code d’éthique et de déontologie.

Par souci de transparence? Plutôt par obligation, puisque la Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale 2 leur en faisait l’obligation. Les municipalités avaient jusqu’au 2 décembre 2011 pour adopter un tel code (art. 45).

C’est la CMQ qui est chargée de mener les enquêtes relatives à des manquements déontologiques invoqués à l’encontre d’élus municipaux. Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, en décembre 2010, 13 décisions portant sur de telles enquêtes ont été répertoriées 3.

Seules 2 de ces 13 plaintes ont donné lieu à l’imposition d’une sanction et, dans chaque cas, il s’agissait d’une réprimande, soit la sanction la moins sévère prévue à la loi 4.

Dans le premier cas 5, un conseiller municipal de Beauceville avait posé sa candidature à un poste de responsable technique pour la municipalité et l’avait obtenu. La CMQ a jugé que, en imposant des conditions minimales d’emploi à son futur employeur, le conseiller s’était placé en situation de conflit d’intérêts.

Dans le second cas 6, afin de servir ses intérêts personnels dans l’élection de nouveaux conseillers, un conseiller municipal a publié un article dans le journal local qui contenait des renseignements confidentiels obtenus dans l’exercice de ses fonctions et qui dénigraient une ancienne employée. Encore une fois, la CMQ a conclu à un conflit d’intérêts. On n’a toutefois pas retenu son manque de respect envers une ancienne employée parce que le code d’éthique et de déontologie de la municipalité de paroisse de Sainte-Séraphine ne contenait aucune règle à cet égard.

Qu’en sera-t-il des accusations portées au printemps 2012 contre certains élus municipaux? S’ils sont reconnus coupables, les tribunaux pourront toujours s’inspirer des peines imposées pour abus de confiance aux conseillers municipaux de la Ville de Montréal Dussault et Grundman, qui ont écopé de 23 mois à purger dans la collectivité et d’amendes de 25 000 $ et 50 000 $, respectivement 7.

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