J’ai retenu l’affaire Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et Québec (Gouvernement du), (T.A., 2013-08-07), SOQUIJ AZ-50996413, rendue en matière d’absentéisme, qui met en cause un technicien en vérification fiscale qui travaillait à l’ancien ministère du Revenu. Il avait vécu des épisodes dépressifs récurrents auxquels s’étaient greffées d’autres maladies ou blessures. Au cours des sept années ayant précédé son congédiement, il avait affiché un absentéisme moyen de 41 %. L’employeur l’a congédié.
Afin de justifier un congédiement administratif fondé sur ce motif, l’employeur doit établir trois éléments : 1) la présence d’un taux excessif d’absences du travail; 2) l’incapacité de fournir une prestation de travail dans un avenir prévisible; et 3) le respect de l’obligation d’accommodement.
Si j’ai retenu cette décision, c’est parce qu’elle met en lumière un point particulier soulevé par le syndicat relativement au fardeau de preuve de l’employeur quant au taux excessif d’absences du travail.
Jurisprudence et doctrine à l’appui, le syndicat a prétendu que l’employeur n’avait pas fait la preuve d’un taux excessif d’absences du travail en ne présentant pas de comparables au sujet de l’absentéisme moyen de l’ensemble de son personnel. Selon lui, l’absence de comparables était fatale pour l’employeur, et le congédiement devait être annulé.
Or, l’arbitre a estimé que l’absence de comparables n’était pas déterminante. Il a poursuivi en disant que l’employeur peut faire la preuve du caractère excessif de l’absentéisme au moyen de plusieurs faits et données, lesquels doivent cependant conduire à une telle conclusion presque irréfutablement.
Ici, il a considéré que le taux d'absences moyen du plaignant, qui était de 41 % au cours des sept années précédentes, était, à sa face même, excessif. À ce sujet, il est intéressant de prendre connaissance de la compilation des taux d’absences du travail jugés excessifs par les décideurs et faite par la doctrine.
De plus, s’appuyant sur certains commentaires trouvés dans la jurisprudence arbitrale, il a retenu que l’incapacité de l’employé à accomplir adéquatement ses fonctions pouvait également servir d’indice afin de mesurer le caractère excessif de l’absentéisme. Concrètement, ce technicien, qui avait 20 ans d’expérience, ne se voyait confier que des dossiers simples dont il n’avait même pas été en mesure d’assurer le suivi en raison de ses nombreuses absences du travail.
À cela s’ajoutait la pratique du plaignant d’épuiser systématiquement ses banques de congés de maladie et de vacances chaque année. Une telle pratique, selon l’arbitre, démontrait, non seulement un taux élevé d’absences, mais un absentéisme excessif. Ainsi, l’arbitre a conclu que l’employeur avait réussi à établir le premier élément dont il avait le fardeau de la preuve, soit: le taux excessif d’absences.
Un petit mot sur les deux autres éléments à prouver: l’incapacité du plaignant de fournir sa prestation de travail dans un avenir prévisible et l’obligation d’accommodement de l’employeur.
Relativement à l’incapacité de ce technicien à fournir sa prestation de travail dans un avenir prévisible, l’arbitre a souligné que la longue période pendant laquelle l’absentéisme avait perduré, la nature des absences du travail, le fait de s’absenter de nouveau même après le transfert dans une équipe différente afin d’accommoder le plaignant, son manque d’autocritique ainsi que son refus de suivre les recommandations formulées par un expert et de répondre aux demandes de l’employeur permettaient de croire qu’il n’y aurait pas d’amélioration dans l’avenir.
Quant à l’obligation d'accommodement, l’arbitre s’est dit d’avis que l’employeur y avait satisfait, notamment en aménageant les heures de travail de ce dernier, en lui permettant des retours au travail progressifs et en faisant preuve de tolérance dans la gestion de ses jours de vacances.
L’arbitre a donc confirmé le congédiement au motif que cet employé était incapable de fournir une prestation de travail normale dans un avenir prévisible.
Références
- Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et Québec (Gouvernement du), (T.A., 2013-08-07), SOQUIJ AZ-50996413.
- Doctrine : Bernier, Blanchet, Granosik et Séguin, Les mesures disciplinaires et non disciplinaires dans les rapports collectifs du travail, 2e Édition, Éditions Yvon Blais.
Jurisprudence très intéressante