J’avais rédigé en novembre 2016 un billet sur la décision d’une arbitre de griefs, Francine Beaulieu, qui avait déclaré dans l’affaire Syndicat des travailleurs et travailleuses de Sysco-Québec-CSN et Sysco Services alimentaires du Québec (grief collectif) que l’installation du système de caméras DriveCam dans l’habitacle des camions de transport alimentaire qui filmait en continu les chauffeurs portait atteinte à leur droit à la protection de la vie privée et à celui à des conditions de travail justes et raisonnables.
Faisant un bref résumé de la décision de l’arbitre, je mentionne que celle-ci avait conclu que Sysco, l’employeur, n’avait pas établi de problème particulier, réel et continu justifiant l’installation d’un tel système de caméras. Cette mesure n’était donc pas nécessaire, et elle avait ajouté qu’il existait d’autres moyens moins intrusifs que celui utilisé par l’employeur.
Elle a donc ordonné le retrait des caméras.
Or, l’employeur, qui effectue le transport de produits alimentaires également aux États-Unis où il a comme pratique de munir ses camions d’un tel système de surveillance, avait tout intérêt à porter cette décision en contrôle judiciaire devant la Cour supérieure afin de faire annuler la décision de l’arbitre de griefs.
La décision de la Cour supérieure
La Cour, sans se prononcer sur l’existence ou non d’une violation au droit à la vie privée des chauffeurs ou au droit à des conditions de travail justes et raisonnables, a jugé que la décision de l’arbitre devait être maintenue puisque, selon la norme de contrôle applicable, cette décision n’était pas déraisonnable (Sysco Québec, division de Sysco Canada inc. c. Beaulieu).
L’arbitre s’était appuyée sur la doctrine et la jurisprudence, et elle avait rappelé les principes suivants dans la décision initiale :
- il faut une justification raisonnable de l’employeur pour qu’il y ait surveillance; et
- il doit auparavant vérifier s’il n’y a pas un autre moyen moins intrusif.
J’ajouterais que, en matière de transport de produits ne présentant pas de danger relatif à la sécurité, la décision rendue par l’arbitre de griefs, maintenue par la Cour supérieure, constitue non seulement un jalon de plus relativement à la surveillance par caméra pouvant être effectuée à l’intérieur de l’habitacle d’un camion, mais un incontournable à lire.
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On s’en souviendra, en matière de transport de matières dangereuses, un autre arbitre de griefs avait rendu une décision contraire, approuvant l’installation d’un tel système de surveillance dans l’affaire Teamsters Québec, section locale 106 et Linde Canada ltée (grief syndical) en raison des risques élevés d’explosion mettant en danger la sécurité de tous, et ce, suivant une preuve prépondérante qui avait été faite (billet «Les transporteurs de matières dangereuses : la caméra filme en continu»).
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