En vertu de l’article 1725 du Code civil du Québec, le vendeur d’un immeuble doit garantir à l’acheteur que l’immeuble ne contrevient pas aux règlements municipaux et provinciaux au moment de la vente. Cette garantie ne s’applique toutefois pas lorsque le vendeur a dénoncé ces limitations à l’acheteur lors de la vente, lorsqu’un acheteur prudent et diligent aurait pu les découvrir par la nature, la situation et l’utilisation des lieux ou lorsqu’elles font l’objet d’une inscription au bureau de la publicité des droits.

Voici quelques exemples d’application de cette garantie tirés de la jurisprudence récente.

Duplex, triplex ou maison unifamiliale ?

Dans Arsenault c. Roy, les acheteurs d’un triplex qui ont dû effectuer des travaux majeurs pour rendre conforme le troisième logement au sous-sol, qui avait été aménagé sans permis, ont obtenu 15 000 $ de leur vendeur, du courtier immobilier inscripteur et de l’agence de celui-ci. Le courtier immobilier inscripteur s’était engagé à faire les vérifications requises auprès de la municipalité puisque l’inspecteur en bâtiments des acheteurs les avait mis en garde contre une possible limitation de droit public. Il a manqué à son obligation de vérifier l’information contenue dans la fiche descriptive de l’immeuble.

Un cas semblable est survenu dans Paris c. Gareau. La demanderesse a acheté une maison de plain-pied avec un logement au sous-sol qui, selon la fiche descriptive de l’immeuble, engendrait des revenus annuels de 6 600 $. Elle a effectué des travaux de rénovation et elle a alors appris que le logement était illégalement utilisé, car il contrevenait à la réglementation municipale. Le locataire a dû quitter les lieux et le logement a été refait selon les normes. L’acheteuse a obtenu 18 989 $ du vendeur et du courtier immobilier, qui avait manqué à son obligation de vérifier l’information indiquée dans la fiche descriptive de l’immeuble, notamment pour les travaux correctifs, la perte de revenus locatifs et les inconvénients subis.

Dans Therrien c. Bélanger, l’acheteur d’un immeuble vendu comme étant un duplex alors que le permis obtenu pour la construction visait un immeuble unifamilial a obtenu de son vendeur une diminution du prix de vente ainsi que des dommages-intérêts totalisant 31 265 $.

Dans Fauteux c. Belec, le triplex vendu dérogeait aux règlements de zonage et de construction, car il ne s’agissait pas véritablement d’un triplex, mais plutôt d’un duplex. L’acheteur a obtenu une diminution du prix de vente de 9 588 $.

Chalet agrandi sans permis de construction

Dans Mercier c. Duchesne, le juge a conclu que le vendeur avait manqué à son obligation de délivrance et à celle de garantir le droit de propriété en vendant un chalet sans informer l’acheteur que des travaux majeurs de rénovation avaient été effectués sans permis de construction. L’acheteur a reçu un avis d’infraction le sommant de réclamer un permis de démolition afin de réduire la superficie du plancher, et des acheteurs à qui il a voulu revendre l’immeuble se sont désistés après avoir été informés que les travaux contrevenaient à la réglementation. L’annulation de la vente a donc été ordonnée.

Installations septiques non conformes

L’acheteur d’un immeuble dont le système d’épuration des eaux usées n’était valable que pour une résidence ne comprenant qu’une seule chambre, alors qu’elle en comptait deux lors de la vente, a obtenu des dommages-intérêts de 3 000 $ (Patry c. Noël).

Piscine creusée installée sans permis

Les vendeurs d’un immeuble qui ont installé illégalement et sans permis une piscine creusée et qui ont omis de s’assurer que le plan accompagnant le certificat de location reflétait adéquatement l’état des lieux sont solidairement responsables, avec l’arpenteur-géomètre, des dommages subis par les acheteurs (6 369 $) (Provencher c. Traversy).

Exclusion de la garantie

Toutefois, les parties peuvent, dans leur contrat, ajouter aux obligations de la garantie légale, en diminuer les effets ou l’exclure entièrement. Une telle clause est tout à fait valide dans la mesure où le vendeur a agi de bonne foi et ignorait la violation à une limitation de droit public. Par conséquent, l’acheteur qui atteste dans l’offre d’achat ou dans l’acte notarié qu’il a personnellement vérifié auprès des autorités la conformité de la destination qu’il entend donner à l’immeuble aux lois et aux règlements en vigueur renonce par le fait même à se prévaloir de la garantie à l’endroit de son vendeur. C’est ce qui est arrivé dans Bélanger c. Girard.

Obligation de prudence et de diligence

Enfin, dans Beauchemin c. Lavoie, l’acheteuse d’un immeuble n’a pas obtenu l’annulation de la vente en invoquant la garantie contre les limitations de droit public car, tout comme la vendeuse, elle était parfaitement au courant qu’il s’agissait d’une maison de chambres plutôt que d’un duplex et que cet usage contrevenait à la réglementation municipale. Avant de signer le contrat de vente, le notaire l’avait d’ailleurs mise en garde relativement au fait que l’immeuble semblait être une maison de chambres plutôt qu’un duplex, mais elle n’a pas réagi et elle n’a posé aucune question à ce sujet. Elle n’a pas fait preuve de la vigilance et de la prudence normales qui sont exigées d’un acheteur raisonnablement prudent et avisé.

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