Ça y est, vous êtes prêt à partir! Vous avez obtenu votre passeport, fait vos bagages et planifié votre séjour à l’étranger. Mais avez-vous pensé à cette réclamation que vous avez produite à la CNESST et dont vous êtes toujours sans nouvelles? Probablement pas. Et si une décision défavorable était rendue en votre absence? Les 2 affaires qui suivent devraient vous inciter à faire preuve de prudence avant votre départ.
Des vacances planifiées sans que la CNESST soit avisée
Dans la première affaire, Meziane, le travailleur produit une réclamation à la CNESST le 8 juillet 2016 pour une brûlure à l’avant-bras survenue alors qu’il était au travail. Puis, le 22 juillet 2016, il quitte le pays pour des vacances en Algérie. À son retour, 36 jours plus tard, il prend connaissance dans son courrier d’une décision de la CNESST rendue en son absence qui refuse sa réclamation. Le travailleur demande la révision de cette décision le 7 septembre 2016. L’instance de révision de la CNESST déclare sa demande irrecevable, car celle-ci a été produite à l’extérieur du délai de 30 jours prévu à l’article 358 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) et le travailleur n’a pas démontré un motif raisonnable qui aurait permis de le relever de son omission en vertu de l’article 358.2 LATMP.
Devant le Tribunal administratif du travail (TAT), le travailleur a tenté d’expliquer son retard à demander la révision :
- Il se trouvait à l’extérieur du pays et personne ne gérait son courrier;
- À son retour, il a communiqué avec la CNESST;
- Il a trouvé trop compliqué de contester sur Internet; et
- Il est revenu au travail et a communiqué avec son syndicat.
Dans sa décision, le TAT a plutôt constaté que le travailleur n’avait pas fait preuve de diligence :
«[86] Le travailleur sait ou doit savoir que la Commission rendra une décision incessamment dans son dossier et qu’il est plausible ou probable que cette décision lui sera acheminée durant son absence. […]
[87] Pourtant, le travailleur ne souffle mot à la Commission de ce voyage prévu depuis un certain temps. Il n’interroge pas la Commission sur le traitement de son dossier durant son absence.
[…]
[89] Le travailleur sera absent 36 jours du pays, sans le préciser à la Commission, à son employeur ou à son médecin. Le travailleur n’a pas été transparent.
[90] Le travailleur planifie un long voyage de 36 jours hors du pays, mais ne confie pas la gestion du courrier ou le suivi de son dossier de réclamation à un mandataire. Le travailleur est syndiqué, il pouvait demander à la Commission de transmettre la décision à son syndicat avec mandat de contester, si défavorable, mais il ne l’a pas fait.»
[Caractères gras ajoutés.]
Le TAT n’ayant pas été convaincu par les explications données par le travailleur, il a conclu en l’absence d’un motif raisonnable. Il a donc confirmé la décision rendue par l’instance de révision de la CNESST et a déclaré irrecevable la demande de révision du travailleur.
L’importance d’une correspondance reçue durant son absence
Dans l’affaire Carignan-Leblanc, le travailleur présente une réclamation à la CNESST au début de l’année 2016 à la suite de blessures subies lors d’un accident d’automobile, alors qu’il se déplaçait pour son travail. Peu de temps après, sans nouvelles de la CNESST, il démissionne de son emploi et quitte le pays le 7 mars 2016. Durant son absence, en juillet 2016, la personne qui s’occupe de son courrier avise le travailleur qu’il a reçu une lettre de la CNESST. Pour des raisons de confidentialité, le travailleur demande à cette personne de ne pas ouvrir cette lettre. Il affirme qu’il s’en occupera lorsqu’il reviendra de son séjour à l’étranger. À son retour au pays, le 17 novembre 2016, il prend connaissance de 2 correspondances de la CNESST : une lettre du 16 mars 2016 qui refuse sa réclamation et une autre du 25 juillet 2016 qui lui réclame le remboursement de montants déjà payés. Le 10 janvier 2017, le travailleur demande la révision de la décision refusant sa réclamation. Tout comme dans la première affaire, la CNESST déclare irrecevable la demande de révision du travailleur en raison du non-respect du délai de 30 jours.
Devant le TAT, le travailleur a expliqué n’avoir pris connaissance de la décision refusant sa réclamation qu’à son retour et qu’il a ensuite fait les démarches nécessaires à l’actualisation de son dossier. Le TAT a plutôt souligné le manque de diligence du travailleur :
«[19] Le cas du travailleur est analogue à celui décrit à la décision Nestarez Flores et T. Lauzon ltée où il a été décidé qu’il est négligent de ne pas demander à la personne responsable de son courrier de lui communiquer le contenu d’une correspondance de la Commission.
[20] D’abord, en faisant appel au régime d’indemnisation avant son départ, le travailleur aurait dû être plus diligent quant à la conduite de ses affaires lors de son absence. De plus, dès qu’on lui communique l’existence d’une correspondance de la Commission au mois de juillet 2016, le travailleur aurait dû soupçonner son importance et aurait dû s’en intéresser. En décidant de s’en occuper uniquement à son retour, le travailleur pose ici un geste déterminant qui témoigne de son manque de diligence et de vigilance.
[21] Pour ce qui est de la période suivant son retour au pays, entre novembre 2016 et janvier 2017, la conduite du travailleur est également empreinte d’insouciance. Il explique qu’il n’a pas assuré un suivi soutenu auprès de la Commission, car il devait s’acheter une voiture, se trouver un logis, gérer certaines de ses propriétés et obtenir de nouvelles cartes gouvernementales.
[22] Le Tribunal estime que parmi ces tâches, le travailleur aurait dû se préoccuper davantage de son dossier d’indemnisation. Il s’écoule ici 54 jours entre le moment où il prend connaissance des correspondances et le moment où il dépose sa contestation. Bien qu’il demeure en attente d’un retour d’appel d’un agent de la Commission, cette situation ne lui permet pas de demeurer passif alors que le délai de contestation file.»
[Caractères gras ajoutés.]
Insatisfait des motifs exprimés par le travailleur, le TAT a également conclu dans ce dossier à l’absence de motif raisonnable et a déclaré irrecevable la demande de révision du travailleur.
Alors, un conseil. Afin d’avoir l’esprit tranquille au moment de votre prochain voyage hors du pays, avisez les organismes administratifs qui doivent l'être et, surtout, confiez la gestion de votre courrier à une personne de confiance qui pourra vous aviser qu’une décision vous concernant a été rendue.
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