C’est bien connu, querelles ou bagarres entre employés, accidents du travail ainsi que harcèlement sexuel sont au nombre des situations susceptibles de survenir non seulement pendant les heures du travail, mais aussi pendant toute activité de loisir organisée par l’employeur.

Le party de Noël n’y échappe malheureusement pas !

D’ailleurs, à ce sujet, je vous invite à consulter le billet étoffé de Me Nancy Fortin et celui de Me Annick Poulin, qui font un tour d’horizon à la fois en matière de reconnaissance de lésions professionnelles pendant le party de Noël et de mesures disciplinaires pouvant être imposées afin de sanctionner des cas d’inconduite. Voici également l’entrevue Les obligations de l’employeur s’appliquent aussi aux partys de bureau (29 novembre 2017), que j’ai accordée à l’émission Les éclaireurs, diffusée à la radio de Radio-Canada.

Maintenant, pour le propos de ce billet, je vous présente l’affaire récente Société du Palais des Congrès de Montréal, rendue en 2018, qui pose la question suivante :

Peut-on conclure à la survenance d’un accident du travail si la blessure d’un travailleur survenait pendant une fête organisée non pas par l’employeur mais par le syndicat ?

Faits :

  • La travailleuse, une agente de bureau, s’est blessée en aidant à la préparation d’une fête organisée par le syndicat;
  • la fête visait l’accueil de nouveaux employés;
  • elle se trouvait dans les locaux fournis par l’employeur;
  • la travailleuse agissait en dehors de ses heures de travail et n’était plus rémunérée;
  • la travailleuse n’était pas soumise à l’autorité de l’employeur;
  • la travailleuse était libre de participer à l’activité et c’est de son propre chef qu’elle s’était portée volontaire afin d’aider à l’organisation de cette dernière;
  • l’employeur n’a pas participé à l’organisation de l’activité et n’avait aucun droit de regard sur le contenu de l’information livrée aux participants.

Le Tribunal a reconnu que cette travailleuse, qui s’était blessée en dehors des heures de travail alors qu’elle aidait à la préparation d’une activité organisée par le syndicat, avait subi un accident du travail ayant entraîné une lésion professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Même s’il ne s’agissait pas dans le cas présent d’une fête de Noël, les principes rappelés à l’égard de toute activité de loisir ayant un lien avec le travail sont transposables. Seul le contexte factuel de la fête varie…

À cet égard, le Tribunal administratif du travail (TAT) a cité à l’appui de sa décision l’affaire Battram, où il a été considéré qu’une lésion survenue au cours d’une réception pour souligner la fête de Noël et le départ d’une collègue constituait une lésion professionnelle même si l’organisation de la fête avait été à l’initiative des employés et sans la participation de l’employeur.

Déterminer le but de l’activité exercée lors de la survenance de la lésion

Le principe est reconnu par la jurisprudence : la nature et la finalité de l’activité exercée lors de la survenance de la lésion sont déterminantes dans l’analyse de la connexité entre l’activité et le travail, laquelle est essentielle afin de reconnaître que l’accident est survenu «à l’occasion du travail» en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Tisser des liens entre employés est «utile» pour l’employeur

Ici, le Tribunal a notamment retenu de la preuve que les témoignages et l’encart promotionnel de l’événement révélaient que celui-ci :

  • visait l’accueil des nouveaux employés ;
  • permettait de tisser des liens entre les employés ; et
  • favorisait un sentiment d’appartenance chez l’employeur.

L’activité avait pour but de favoriser de bonnes relations de travail et, comme le souligne le TAT, il a déjà été établi, dans Centre local de services communautaires Parc Extension, que celle-ci contribuait au succès de l’employeur, ce qui est à son avantage.

Il a donc été reconnu que cette travailleuse avait subi une lésion professionnelle lui donnant droit à une indemnisation en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

On l’aura compris, tout accident survenant pendant une fête organisée par le syndicat ne peut être automatiquement qualifié d’« accident du travail ». Tout dépend des circonstances, car ce sont des situations évaluées au cas par cas, à la lumière des critères établis par la jurisprudence.

Du moins, il est clair que l’absence de participation de l’employeur à l’événement n’est pas un facteur empêchant nécessairement la reconnaissance d’un accident du travail.

Pour en savoir plus sur la qualification des accidents survenant à l’occasion d’activités syndicales…

La présente affaire, Société du Palais des Congrès de Montréal, fait une revue de plusieurs décisions sur le sujet, lesquelles reconnaissent ou non l’existence d’un accident du travail. À consulter…

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