Même si certaines compagnies aériennes le contestent, le nouveau Règlement sur la protection des passagers aériens (communément appelé «charte des voyageurs»), adopté en vertu de la Loi sur les transports du Canada, est partiellement entré en vigueur le 15 juillet dernier. Le 15 décembre prochain, l’ensemble du règlement le sera. En voici les grandes lignes.

Le règlement s’applique à tous les vols à destination, en provenance et à l’intérieur du Canada, y compris les vols de correspondance.

Retard sur l’aire de trafic (« délais de tarmac »)

Lorsqu’un vol est retardé sur l’aire de trafic après la fermeture des portes de l’avion (avant le décollage ou après l’atterrissage), le transporteur doit fournir, sans frais:

  • des toilettes fonctionnelles
  • de la ventilation et de la climatisation ou du chauffage adéquat
  • un moyen de communiquer avec des personnes à l’extérieur de l’aéronef
  • de la nourriture et des boissons en quantité raisonnable
  • l’accès à de l’aide médicale, au besoin

Si l’appareil est sur l’aire de trafic d’un aéroport canadien, le transporteur doit aussi permettre aux passagers de sortir de l’avion après 3 heures, sauf si le décollage est imminent (dans les 45 prochaines minutes) ou si des raisons de sécurité l’en empêchent.

Retard, annulation de vol et refus d’embarquement

En cas de situation indépendante de la volonté du transporteur (par exemple conditions météorologiques, instructions du contrôle de la circulation aérienne, menace à la sûreté, conflit de travail du transporteur ou de l’aéroport, urgence médicale, etc.), le transporteur doit informer les passagers de la raison du retard, de l’annulation ou du refus d’embarquement. Ces informations doivent être mises à jour à toutes les 30 minutes.

De plus, s’il s’agit d’un retard de plus de 3 heures, d’une annulation ou d’un refus d’embarquement, le transporteur doit aussi réacheminer les passagers sur le prochain vol disponible (arrangements de voyage alternatifs).

En cas de situation attribuable au transporteur mais nécessaire par souci de sécurité (par exemple un problème mécanique imprévu qui ne découle pas de l’entretien régulier), le transporteur a le même devoir de renseignement envers les passagers, et les obligations suivantes s’ajoutent:

  • En cas de retard: si les passagers sont informés du retard moins de 12 heures avant l’heure de départ prévue et que celui-ci est d’au moins 2 heures, le transporteur doit leur fournir de la nourriture, des boissons, l’accès à un moyen de communication électronique (par exemple le Wi-Fi gratuit) et un hébergement, s’il y a lieu. S’il s’agit d’un retard de 3 heures ou plus, des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement doivent être offerts.
  • En cas d’annulation de vol communiquée moins de 12 heures avant l’heure de départ prévue, les mêmes obligations s’imposent au transporteur.
  • En cas de refus d’embarquement: le transporteur doit d’abord demander s’il y a des volontaires qui acceptent de laisser leurs sièges. Un passager déjà à bord ne peut faire l’objet d’un refus d’embarquement, sauf pour des raisons de sécurité. Ceux qui acceptent de céder leur place ont droit à une indemnité qui doit leur être confirmée par écrit. Le règlement prévoit aussi dans quel ordre de priorité les passagers qui se verront refuser l’embarquement seront sélectionnés. Des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement doivent également être fournis de même que de la nourriture, des boissons et un hébergement.

En cas de retard ou d’annulation de vol attribuable au transporteur mais non liée à la sécurité (par exemple en cas de problème mécanique découlant de l’entretien régulier obligatoire de l’appareil), en plus des obligations précédentes, le transporteur doit verser une indemnité aux passagers si ceux-ci en ont été informés 14 jours ou moins avant le départ.

S’il s’agit d’un gros transporteur (par exemple Air Canada, Air Transat, Sunwing, Westjet et autres grandes compagnies aériennes), l’indemnité minimale varie en fonction du retard à la destination finale:

  • Retard de 3 à 6 heures: 400 $
  • Retard de 6 à 9 heures: 700 $
  • Retard de 9 heures ou plus: 1 000 $

Dans le cas d’un petit transporteur, ces indemnités sont réduites respectivement à 125 $, 250 $ et 500 $.

L’indemnité n’est pas automatique: les passagers doivent la réclamer dans un délai de 1 an. Le transporteur doit y répondre dans les 30 jours suivants.

S’il s’agit d’un refus d’embarquement pour une raison attribuable au transporteur (par exemple en cas de surréservation ou de changement d’aéronef pour un entretien régulier), les indemnités sont plus importantes. Elles varient aussi en fonction du délai dans lequel le passager arrivera à destination et doivent être versées au plus tard 48 heures après le refus d’embarquement.

  • Délai de moins de 6 heures: 900 $
  • Délai de 6 à 9 heures: 1 800 $
  • Délai de plus de 9 heures: 2 400 $

Dans tous les cas, l’indemnité payable par le transporteur doit être versée en argent.

Les passagers peuvent accepter une autre forme d’indemnisation (par exemple des coupons ou des bons d’échange), mais les conditions suivantes doivent être remplies:

  • la valeur doit être supérieure à l’indemnité minimale prévue
  • le passager doit être informé par écrit du montant
  • il ne doit pas y avoir de date d’expiration
  • le passager doit confirmer par écrit qu’il a été informé de son droit à une indemnité en argent mais qu’il préfère la recevoir sous une autre forme

Enfin, le règlement prévoit de nouvelles règles concernant l’attribution de sièges aux enfants de moins de 14 ans à proximité d’un parent ou d’un tuteur sans frais supplémentaires, des indemnités pour les bagages perdus ou endommagés ainsi que des modalités pour le transport d’instruments de musique.

Quelques problèmes à anticiper

Ce nouveau règlement est un pas dans la bonne direction et permet dorénavant d’encadrer les pratiques des transporteurs aériens. Il soulève toutefois quelques questions. Par exemple:

Qu’est-ce qu’une « situation indépendante de la volonté du transporteur »? Comment obtenir la preuve de la cause du problème mécanique? Comment prouver qu’il s’agissait d’un bris prévisible? Qu’est-ce qui constitue un problème mécanique imprévu qui ne découle pas de l’entretien régulier obligatoire de l’appareil (qui est donc indemnisable)?

La Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international (ou Convention de Montréal), un traité international intégré en droit interne et qui prévoit déjà des indemnités en cas de retard, a-t-elle préséance sur le nouveau règlement? Les indemnités prévues sont-elles compatibles?

À suivre!

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