La Loi sur la taxe de vente du Québec impose plusieurs obligations aux établissements de restauration et aux bars. Parmi celles-ci se trouvent celle de remettre des factures pour chaque transaction, notamment pour la fourniture d’un droit d’entrée, tel qu'il est prévu à l’article 350.51 de la loi. Les factures doivent être préparées en utilisant le module d’enregistrement des ventes (MEV) approuvé par Revenu Québec (art. 350.52).

Mais qu’est-ce qu’un «droit d’entrée»? C’est la question qui a récemment été posée dans 2328-3526 Québec inc. (Café Cléopâtre).

L’infraction reprochée

Des inspecteurs de l’Agence du revenu du Québec (ARQ) se sont présentés au Café Cléopâtre à 2 reprises, incognito. Il s’agit d’un établissement licencié de 2 étages: le premier est utilisé comme boîte de nuit où se produisent des danseuses érotiques, tandis que le second sert de salle de spectacles.

À l’extérieur du cabaret, une affiche indiquait «Pas de frais d’admission. Pourboire à votre discrétion est apprécié». Malgré le message de cet écriteau, le portier a interpellé les inspecteurs et il a exigé qu’ils payent 5 $ afin d’accéder à l’intérieur. Aucun reçu ne leur a été remis et ces frais ne se trouvent pas sur la facture relative à leurs consommations.

À la suite de ces visites, une inspection complète des MEV du Café Cléopâtre a été faite. Toutes les transactions relatives aux consommations d’alcool étaient en règle, mais aucune transaction liée aux sommes payées par les clients à l’entrée n’y était enregistrée.

Le Café Cléopâtre a donc été accusé d’avoir contrevenu à la loi en n’enregistrant pas les transactions à l’aide d’un MEV. Il s’est défendu en prétendant que la somme d’argent remise au portier était strictement donnée en guise d’appréciation à l’égard du service de sécurité qu’il assure dans l’établissement et non pour accéder aux lieux. Il s’agirait de pourboires qui ne doivent pas être enregistrés.

Caractère péremptoire du droit d’entrée

Or, la juge de paix magistrat a plutôt conclu qu’il s’agit d’un droit d’entrée et non d’un pourboire. Le seul élément légal qui distingue le premier du second est son caractère péremptoire. Dès lors qu’une somme d’argent est exigée d’un client en contrepartie d’un accès à l’établissement, même de manière ponctuelle, celle-ci constitue un droit d’entrée qui consiste en une fourniture taxable. Il s’agit d’une question de fait et chaque cas est un cas d’espèce.

En l’instance, il ne fait aucun doute que tout client placé dans les mêmes circonstances se serait raisonnablement senti obligé de payer une somme d’argent afin d’être admis dans l’établissement. Tant les échanges verbaux avec les portiers que le langage corporel de ceux-ci ont convaincu les inspecteurs qu’ils n’avaient pas le choix de payer la somme demandée sous peine de ne pas être admis à l’intérieur. Le portier bloquait le passage avec son bras et demandait un pourboire aux clients.

Le Café Cléopâtre, qui n’a pas démontré avoir fait preuve de diligence raisonnable pour ne pas commettre l’infraction reprochée, a donc été déclaré coupable.