Les tribunaux ont affirmé à plusieurs reprises que le fait de refuser de louer un logement à une personne au motif que celle-ci entend y habiter avec ses enfants en bas âge constitue de la discrimination fondée sur l’état civil.

Mais qu'en est-il lorsque le locateur refuse de louer à un jeune au motif que son immeuble est réservé uniquement à une clientèle âgée?

Dans Desjardins c. 9048-5541 Québec inc., le demandeur avait communiqué avec la gestionnaire de la locatrice après avoir pris connaissance de l'annonce d’un logement à louer dans un immeuble multiplex de 16 logements et qui indiquait que la clientèle de l'immeuble était âgée et retraitée. Lors de la conversation téléphonique, la gestionnaire lui aurait demandé son âge et aurait précisé que l’immeuble était occupé par ce type de clientèle et réservé à celle-ci.

Selon le Tribunal des droits de la personne, l’annonce avait comme résultat de ne pas encourager les personnes qui ne faisaient pas partie de la clientèle cible à y louer un logement. La gestionnaire avait d'ailleurs indiqué à l’enquêtrice de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qu'elle ne voulait pas avoir affaire à «des jeunes qui font la fête», «ce qui pouvait amener des chicanes» (paragr. 30). Elle a donc agi en fonction de sa préférence, fondée sur un motif de discrimination interdit par l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.

La gestionnaire et la locatrice ont donc été condamnées à payer la somme de 5 300 $ en dommages matériels, moraux et punitifs pour avoir refusé de conclure avec le demandeur un acte juridique ayant pour objet un bien ordinairement offert au public au sens de l’article 12 de la charte, et ce, en raison de son âge.

L'âge comme motif de discrimination dans l'accès au logement

Bien que les exemples en jurisprudence de discrimination dans l'accès au logement fondée uniquement sur le motif de l'âge soient peu nombreux, en voici quelques exemples:

  • Dans la décision Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Cadieux) c. Lacombe, le tribunal a conclu que le refus systématique de louer des logements à des personnes de moins de 25 ans constituait une pratique discriminatoire prohibée par la charte.
  • Dans la décision Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Lafontaine) c. Maurice, les défendeurs ont été condamnés à payer 2 500 $ en dommages compensatoires et 1 000 $ en dommages punitifs pour avoir refusé de louer un logement à la plaignante, âgée de 19 ans, qu'ils considéraient comme trop jeune.
  • Dans l'affaire Décision — 10, la Commission a qualifié de discriminatoire la politique d'un office municipal d'habitation qui consistait à exiger de ses locataires de 65 ans et plus un certificat médical comme condition de renouvellement de leur bail.

Rappelons que, comme l'enseigne la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Whittom c. Commission des droits de la personne, une évaluation fondée sur des critères purement abstraits, comme l'âge, entraîne des effets pernicieux et la raisonnabilité de l'appréhension du risque doit s'apprécier d'abord et avant tout en fonction de la personne en cause, soit le locataire potentiel.

Un propriétaire ne peut donc pas, pas plus qu'il ne le peut pour tout autre motif discriminatoire basé sur des préjugés ou des stéréotypes, fonder le choix de ses locataires sur l'âge.