L’affaire Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec et Ministère de la sécurité publique met en cause une salariée, une agente de services correctionnels, qui a subi une abdominoplastie, soit une intervention chirurgicale volontaire visant à régler un problème d'obésité et d'esthétique. L'employeur a refusé de lui verser des prestations d’assurance-salaire en cas d’invalidité pendant sa période de convalescence, qui a duré deux mois.
Chaque situation étant liée à l’interprétation de la clause de la convention collective applicable, voici donc le libellé de celle-ci :
«Par invalidité, on entend un état d’incapacité résultant d’une maladie, […] nécessitant des soins médicaux et qui rend l’employé totalement incapable d’accomplir les attributions habituelles de son emploi […].» [Emphase ajoutée.]
Chirurgie esthétique: pas une maladie
L’employeur et le syndicat ont admis que la jurisprudence est constante à ce sujet: une intervention de chirurgie esthétique n’est pas une maladie, à moins d’une disposition expresse au contraire. Ils ont convenu que la chirurgie esthétique était exclue de la notion de «maladie» contenue à la convention collective et, par conséquent, que le jour de l’intervention ne faisait pas partie de la réclamation pour assurance-salaire.
Point en litige: période de convalescence
Selon le syndicat, la période de convalescence doit être considérée comme une maladie justifiant une période d'invalidité, car la plaignante ne peut exécuter ses tâches régulières.
Or, l’arbitre ne retient pas ses prétentions. Il souligne que, en choisissant de subir une intervention chirurgicale volontaire, la plaignante a accepté un plan de traitement de deux mois, planifié à l’avance et dont les conséquences étaient bien connues.
Il a écarté toutes les décisions selon lesquelles des complications reliées à une intervention chirurgicale non requise peuvent donner ouverture au droit d'obtenir des prestations d'assurance-salaire. Il faut prendre connaissance de la revue de la jurisprudence présentée par l’arbitre et portant sur l’état d’incapacité d’une personne suivant une intervention chirurgicale dite volontaire.
À la lumière de la jurisprudence, il a apprécié la situation de la plaignante et a établi certaines distinctions, en s’exprimant ainsi :
«[…] la détérioration de la santé de la plaignante n’était pas due à une autre condition qui s’est développée après la maladie […], ni à une complication distincte de la chirurgie […]. Bien qu’elle était incapable d’accomplir les tâches reliées à sa fonction, la santé de la plaignante n’a pas été pour autant modifiée par l’intervention chirurgicale qui a donné lieu à la période d’invalidité […]» (paragr. 58).
Il a aussi distingué les deux décisions Hydro-Québec, Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec (SCFP-FTQ), section locale 2000 c. Hydro-Québec et Hydro-Québec c. Jutras, au motif que les clauses des conventions collectives applicables étaient libellées différemment.
Il ajoute que la clause n’indique pas «un état d’incapacité ou une maladie, mais bien un état d’incapacité résultant d’une maladie.» (les soulignés sont de l’arbitre). Comme ici l’invalidité de la plaignante ne résulte pas d’une maladie, elle ne peut donc avoir droit aux prestations d'assurance-salaire.
Voilà une intervention chirurgicale qui a coûté plus cher que prévu pour la salariée… À suivre, car cette sentence arbitrale fait l’objet d’une requête en révision judiciaire devant la Cour supérieure. (2014-02-19 (C.S.) 500-17-081169-149.)
Références
- Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec et Québec (Ministère de la Sécurité publique) (Sylvie Bertrand), (T.A., 2014-01-20), 2014 QCTA 125, SOQUIJ AZ-51053379, EXPT 2014-780, D.T.E. 2014T-290.
- Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec (S.C.F.P.-F.T.Q.), section locale 2000 c. Hydro-Québec (C.A., 2001-11-30), SOQUIJ AZ-50106993, J.E. 2002-37, D.T.E. 2002T-2, [2002] R.J.D.T. 1, [2002] R.J.Q. 351.
- Hydro-Québec c. Jutras (C.S., 1998-11-17), SOQUIJ AZ-50779433.
1. Effectivement, on se trouve la dans le cas de la démarche volontaire. Même si il est possible d’argumenter avec pertinence sur le fait qu’une abdominoplastie est une intervention légitime, il s’agira toujours d’un choix dont les circonstances ne sont pas « morbides ». 2. Prendre 2 mois de congés après une plastie abdominale me semble un peu exagéré. Au pire, un chirurgien esthétique pourra ordonner un arrêt d’activité professionnelle d’un mois.
Je pense que la législation en place et trop archaïque et ne prend pas en considération les changements socio-culturelles que connaissent les sociétés. Dans une société du physique et du paraître il n’est plus admissible de ne pas considérer le la chirurgie esthétique dans sa totalité « une maladie »