Aucun employeur du réseau de la santé et des services sociaux ne souhaite que sa réputation soit compromise en raison d’une conduite répréhensible de la part d’un membre de son personnel. Dans une décision récente, un arbitre de griefs s’est penché sur le cas d’une préposée aux bénéficiaires qui contestait son congédiement pour avoir apposé du ruban adhésif afin d’empêcher une dame âgée de se lever de sa chaise. 

Après avoir analysé toutes les circonstances de l’affaire, l’arbitre en est venu à la conclusion que la préposée, par ailleurs une excellente employée au service de l’employeur depuis 17 ans, ne méritait pas de perdre son emploi. Il a déterminé qu’elle n’avait pas exercé de la «maltraitance» mais qu’elle avait plutôt commis une «erreur technique» en ne respectant pas le plan de traitement au dossier de la résidente. Une suspension de deux semaines a été substituée au congédiement.  Veuillez prendre note que cette décision fait l’objet d’un pourvoi en contrôle judiciaire ((2017-09-25), C.S., 540-17-012802-178).

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Ce résumé très succinct d’une décision qui compte une centaine de pages, et dont le cœur se situe surtout autour de la gravité de la faute commise, serait incomplet si je passais sous silence le segment où l’arbitre évoque la crainte de l’employeur que sa réputation ne soit ternie par la diffusion d’un tel incident par les médias.

À ce sujet, voici ce qu’il écrit : «Les représentants de l’Employeur […] ont sans doute aussi été bouleversés, voire traumatisés non tellement par le geste posé […] mais par la perspective que ce geste fasse éventuellement les manchettes des médias, amplifié, cité hors contexte et sans les explications qui m’ont été données par les acteurs de l’incident. […] les représentants de l’Employeur ont tout fait pour rassurer [la fille de la résidente] et pour éviter de voir apparaître à la porte du Centre journalistes et caméras. Ce faisant, cependant, ils ont sans doute conforté [cette dernière] dans son impression que sa mère avait été maltraitée, et cela est absolument malheureux» (paragr. 211).

Selon l’arbitre, l’employeur aurait dû, même timidement, prendre la défense de la plaignante, dont les états de services étaient excellents, et fournir à la fille de la résidente les explications qu’elle n’avait pas eues le soir même de l’incident. À son avis, c’est pour éviter le tapage médiatique que l’employeur a mis de côté les explications de la plaignante ou qu’il n’y a pas cru, alors qu’elles sont finalement logiques et crédibles. Ainsi, ce qu’il a qualifié de «média phobie» a de toute évidence contribué à fausser le jugement de l’employeur et l’a conduit à écarter la présomption de bonne foi dont bénéficiait et bénéficie toujours la plaignante (paragr. 220).

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L’arbitre souligne l’importance d’imposer des mesures sévères aux employés qui exercent de la maltraitance à l’endroit de personnes vulnérables afin de contrer et de faire cesser ces comportements totalement inacceptables. Or, rien dans la conduite de la plaignante ne lui permet de conclure qu’elle aurait maltraité une résidente.

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