Durant l’année 2012, une trentaine de décisions relatives à des plaintes ou des griefs en vertu des articles 123.6 et suivants de la Loi sur les normes du travail pour harcèlement psychologique [art. 81.18 l.n.t.] ont fait l’objet de résumés, diffusés dans la Banque de résumés SOQUIJ — Juridictions en relations du travail. En voici quelques-unes qui ont retenu mon attention.
La distinction entre le harcèlement psychologique et un conflit de travail ou de personnalités est bien illustrée dans Commission scolaire des Hautes-Rivières et Syndicat du personnel de soutien des Hautes-Rivières et dans Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke (SPPUS) et Université de Sherbrooke.
Pour un exemple d’exercice abusif des droits de la direction constituant du harcèlement psychologique, je vous invite à prendre connaissance de la décision Larivière et Collectif de psychothérapie populaire de la Rive-Sud
Dans Sobeys Québec inc. et Travailleuses et travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, section locale 501, l’arbitre de grief a décidé que le plaignant n’avait pas «passé le test» de la personne -- ou de la victime – raisonnable, et il a conclu que la conduite invoquée ne pouvait être qualifiée de «vexatoire».
Il faut aussi lire Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec - unité fonctionnaires et Québec (Gouvernement du) (Ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale), où l’arbitre traite de l’application du critère de la personne raisonnable, précisant que tout salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique.
Diaz Lopez et Costco Wholesale Canada Ltd. (Costco Laval) dépeint un milieu de travail où l’employeur a omis de prendre des moyens raisonnables afin de faire cesser le harcèlement psychologique exercé à l’endroit du plaignant (art. 81.19 l.n.t.). À noter que cette décision a fait l’objet d’un billet de Me Philippe Buist sur le blogue LesAffaires.com et qu’elle a été portée en révision devant la Commission des relations du travail.
Il y a peu de décisions portant sur la réparation du préjudice occasionné par le harcèlement psychologique. Dans Teamsters Québec, section locale 1999 et Produits chimiques Handy ltée (Ruetgers Polymères ltée), (G.G.) (T.A., 2012-08-23), l’arbitre a ordonné le versement d’une somme de 35 000 $ à titre de dommages-intérêts pour atteinte à la dignité et à la réputation du plaignant. Un montant identique a été accordé à la salariée pour atteinte à ses droits fondamentaux dans Côté et Assurancia Marcel Hamel inc.
Enfin, dans Syndicat des éducatrices et éducateurs, professionnelles et professionnels et techniciennes et techniciens du Centre hospitalier Robert-Giffard (FP-CSN) c. Institut universitaire en santé mentale de Québec, la Cour d’appel a rétabli la sentence arbitrale qui avait conclu que l’employeur avait exercé du harcèlement psychologique à l'endroit de la plaignante. Elle a estimé que la Cour supérieure n'aurait pas dû intervenir puisque la conclusion de l'arbitre n’était pas déraisonnable. Cet arrêt fait état des deux tendances jurisprudentielles distinctes lorsqu'il s'agit d'évaluer une plainte pour harcèlement psychologique dans le contexte de l'exercice des droits de la direction. L’arbitre a privilégié une méthode d’analyse plutôt que l’autre. La Cour d’appel a conclu que sa sentence arbitrale se rattachait à l'une des issues possibles qui se justifient au regard de la règle de droit, même si ce n'est pas celle que retiendrait le tribunal de révision.
À la suite de ce bref survol de l’année 2012, je vous suggère de pousser davantage vos recherches enconsultant nos banques de jurisprudence. À ce jour, plus de 600 décisions où il a été question de harcèlement psychologique au travail sont répertoriées dans la Banque de résumés Soquij -- Juridictions en relations du travail. Parmi celles-ci, vous trouverez celles traitant des mesures disciplinaires imposées à l’occasion de situations de harcèlement psychologique, un sujet que je n’ai pas abordé dans ce billet et qui présente un intérêt certain.
Références
- Commission scolaire des Hautes-Rivières et Syndicat du personnel de soutien des Hautes-Rivières (Ginette Leblanc), (T.A., 2012-09-14), SOQUIJ AZ-50895230, 2012EXPT-2025, D.T.E. 2012T-699
- Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke (SPPUS) et Université de Sherbrooke (Jacques J. Anctil), (T.A., 2012-07-26), SOQUIJ AZ-50898333, 2012EXPT-2160, D.T.E. 2012T-757
- Larivière et Collectif de psychothérapie populaire de la Rive-Sud (C.R.T., 2012-03-01), 2012 QCCRT 0111, SOQUIJ AZ-50837650, 2012EXPT-651, D.T.E. 2012T-216
- Sobeys Québec inc. et Travailleuses et travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, section locale 501 (Jacques Terroux), (T.A., 2012-09-03), SOQUIJ AZ-50898242, 2012EXPT-2215, D.T.E. 2012T-771
- Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec - unité fonctionnaires et Québec (Gouvernement du) (Ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale), (Maryse Thériault), (T.A., 2012-06-26), SOQUIJ AZ-50870864, 2012EXPT-1655, D.T.E. 2012T-574
- Diaz Lopez et Costco Wholesale Canada Ltd. (Costco Laval)*, (C.R.T., 2012-11-01), 2012 QCCRT 0491, SOQUIJ AZ-50910824, 2012EXPT-2346, D.T.E. 2012T-830
- Teamsters Québec, section locale 1999 et Produits chimiques Handy ltée (Ruetgers Polymères ltée), (G.G.), (T.A., 2012-08-23), SOQUIJ AZ-50891239, 2012EXPT-1938, D.T.E. 2012T-661
- Côté et Assurancia Marcel Hamel inc. (C.R.T., 2012-01-06), 2012 QCCRT 0004, SOQUIJ AZ-50822003, 2012EXPT-271, D.T.E. 2012T-94
- Syndicat des éducatrices et éducateurs, professionnelles et professionnels et techniciennes et techniciens du Centre hospitalier Robert-Giffard (FP-CSN) c. Institut universitaire en santé mentale de Québec (C.A., 2012-03-21), 2012 QCCA 534, SOQUIJ AZ-50841709, 2012EXP-1352, 2012EXPT-705, J.E. 2012-733, D.T.E. 2012T-230
J’aimerais savoir si pour un employé fédéral qui demeure à Québec et subit du harcèlement au travail par son employeur, quelles sont mes ressources ? Quel tribunal que je dois m’adresser ?
Bonjour,
À ma connaissance, il n’y a pas de recours spécifique visant le harcèlement psychologique dans les lois du travail fédérales. Si vous êtes couvert par une convention collective, votre syndicat devrait pouvoir répondre à vos questions. Vous pouvez également contacter le Centre de justice de proximité du Grand Montréal (514-227-3782).
J’ai entendu qu’un employé syndiqué du gouvernement fédéral qui demeure au Québec peut prendre un recours en déposant aussi sa plainte de harcèlement psychologique comme étant de la violence en milieu de travail et ainsi se prévaloir du processus prévu à 20,9 du Règlement de santé et sécurité au travail du Code Canadien du travail qui oblige l’employeur à nommer un enquêteur impartial et compétent pour mener une enquête qui porterait sur l’ensemble des allégations puisqu’en vertu de ce règlement aucun délai n’existe pour déposer une plainte de violence en milieu de travail. Le choix de l’enquêteur doit aussi être approuvé par le plaignant. La décision rendue par l’enquêteur ou l’employeur peut en être appelée auprès du Tribunal de la Santé et sécurité au travail Canada comme cela a été le cas dans l’affaire Abel Akon et peut par la suite être portée en appel à la Cour Fédérale. Le Tribunal de santé et sécurité au travail du Canada avait soutenu la décision de l’employeur, forçant l’AFPC à porter la cause devant la Cour fédérale. En novembre 2014, la Cour fédérale avait statué que le traitement dont faisait l’objet M. Akon constituait de la violence au travail. Le juge de la Cour fédérale, Michael Manson, avait alors indiqué que l’intimidation ou le harcèlement psychologique peut, avec le temps, être l’une des pires formes de préjudice qu’on puisse infliger à une personne, ce qui allait à l’encontre de la position du gouvernement qui soutenait que la violence au travail se limite à l’usage de la force physique. La Cour fédérale d’appel a soutenu le raisonnement du juge Manson dans sa décision. Ma question est cela donne-t-il droit à une réparation pour dommages pour préjudices sérieux dont a vécu le plaignant ?
Madame,
Lors du dépôt du grief de harcelement, (Art 81.18 et 19), par un employé syndiqué, l’employeur et le syndicat doivent se réunir et décider quoi faire. Par la suite le syndiqué est informé.
Selon la loi, comment vérifier si le syndicat a exercer avec compétence son devoir de représentation efficace et sans négligence?
Le syndiqué , a-t-il le droit de recevoir le rapport écrit résultant du processus d’évaluation du grief par le syndicat et ses officiers le tout consignés dans un rapport écrit par le syndicat?
Cordialement,