Le retour en classe se décline de plusieurs façons. Les obligations qu’il comporte entrent parfois en conflit avec d’autres responsabilités, notamment celles reliées au travail.

Une décision récente du TAT (Anderson-Pinel) est intéressante à cet égard.

Les faits

Le 13 avril 2016, la travailleuse est engagée à titre d’employée occasionnelle sur appel par un CSSS. Elle est assignée à l’entretien ménager et à la lingerie.

La convention collective en vigueur prévoit que, pour être inscrite sur la liste de rappel, la travailleuse doit préciser les journées de la semaine où elle est disponible pour travailler et elle doit offrir «une disponibilité minimale de deux journées de travail par semaine, dont une fin de semaine aux deux semaines» (paragr. 5).

Au printemps 2016, la travailleuse travaille 3 ou 4 jours par semaine.

Durant la période des vacances d’été, elle travaille à plein temps, soit de 32 à 38 heures par semaine.

Au mois d’août 2016, elle s’inscrit à un établissement d’enseignement en vue de suivre une formation menant à un diplôme d’études professionnelles d’infirmière auxiliaire. En attendant une réponse favorable quant à son inscription, elle continue à travailler à plein temps.

Le 5 septembre 2016, la travailleuse se blesse au dos dans l’exercice de ses fonctions et son médecin lui prescrit un arrêt de travail. La CNESST lui verse alors une indemnité de remplacement du revenu (IRR) calculée en fonction d’un horaire de travail à plein temps. Quelques jours plus tard, elle reçoit une réponse positive de l’établissement, confirmant qu’elle entreprendra sa formation le 17 octobre 2016, que la présence en classe est obligatoire et que les cours, d’une durée de 1 800 heures, s’échelonnent du lundi au vendredi, de 8 h à 15 h 35. En attendant de commencer l’école, la travailleuse effectue le travail en assignation temporaire proposé par l’employeur et autorisé par son médecin. À compter du 17 octobre, elle n’est plus disponible pour faire ce travail pendant la semaine, mais elle conserve une disponibilité de 1 fin de semaine sur 2.

Le 14 novembre, acquiesçant à une demande de l’employeur, la CNESST suspend le versement de l’IRR de la travailleuse au motif suivant : «vous avez, sans raison valable, omis ou refusé d’exécuter le travail que votre employeur vous a assigné temporairement conformément à l’article 179 [LATMP]» (paragr. 14).

La travailleuse conteste cette décision devant le Tribunal administratif du travail (TAT)

Les motifs

Le juge administratif Michel Moreau donne raison à la travailleuse.

L’article 6.05 de la convention collective, intitulé «Disponibilité étudiant», prévoit que:

«La personne salariée de la liste de rappel qui est inscrite à un programme d’étude dans une institution reconnue par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, peut être exemptée de la disponibilité minimale si elle démontre qu’elle doit se rendre disponible et présente à son programme d’études

[Les caractères gras et les soulignés sont ajoutés.]

Le juge Moreau s’exprime de la façon suivante :

«[24]   La travailleuse est une personne salariée sur la liste de rappel inscrite à un programme d’études dans une institution reconnue par le ministère. La présence à ses cours étant obligatoire, son statut d’étudiante fait en sorte qu’elle est exemptée de la disponibilité minimale prévue à ses conditions de travail auxquelles doit se soumettre l’employeur. En vertu de l’article 6.05 de la convention, celui-ci ne peut exiger quelque disponibilité que ce soit de la travailleuse qui satisfait aux conditions prévues dans cette disposition.»

«[25]    En d’autres mots, l’employeur ne peut reprocher à la travailleuse son indisponibilité à faire le travail en assignation temporaire si ses conditions de travail l’exemptent de toute disponibilité minimum lorsqu’elle est inscrite dans un programme d’études visé à l’article 6.05 de la convention collective. Dans ce cas, l’employeur renonce implicitement à son droit à l’assignation temporaire.»

[Les caractères gras sont ajoutés.]

Je laisse le mot de la fin au juge Moreau :

«[26]   Le Tribunal conclut que la travailleuse justifiait d’une raison valable de refuser de faire le travail en assignation temporaire proposé par l’employeur. Comme la lésion professionnelle n’était pas consolidée en date du 16 novembre 2016, elle avait toujours droit de recevoir l’indemnité de remplacement du revenu

[Les caractères gras sont ajoutés.]

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