Dans Pitl, la Cour d’appel indique que ce n’est pas parce qu’une clause de non-concurrence est contenue dans un contrat type qu’elle est nécessairement raisonnable.

Le droit

Pour être valide, toute clause de non-concurrence doit être limitée quant à sa durée, à son territoire d’application et aux activités qu’elle interdit. Cette limite est fonction de ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de la personne qui en demande l’application.

Les faits

En 2006, Grégoire, qui venait de terminer ses études en médecine dentaire, a commencé à travailler au centre dentaire de Pitl. Soucieuse de s’assurer une plus grande sécurité professionnelle, elle a indiqué à celui-ci qu’elle désirait avoir une entente écrite.

C’est dans ce contexte que les parties ont signé un contrat type obtenu auprès de l’Association des chirurgiens dentistes du Québec (ACDQ). Ce contrat contenait une clause de non-concurrence et de non-sollicitation déjà entièrement rédigée, incluant la portée territoriale de l’obligation de non-concurrence :

9. CLAUSE DE NON-CONCURRENCE ET DE NON-SOLLICITATION

À l’échéance du présent contrat ou lors du départ du fournisseur, ce dernier s’engage à ne pas exercer la médecine dentaire, à quelque titre que ce soit, dans un rayon de 4 kilomètres du cabinet du bénéficiaire, et ce, pendant une période de 2 ans.

En mars 2014, Grégoire a cessé définitivement ses activités professionnelles au centre dentaire. Quelques mois plus tard, elle a commencé à travailler dans une autre clinique. Elle a été poursuivie, notamment pour avoir contrevenu à la clause de non-concurrence.

Les jugements rendus

En première instance, la juge Johanne April a conclu que la clause de non-concurrence était manifestement déraisonnable puisqu’elle interdisait toute participation de Grégoire dans une entreprise similaire, l’empêchant ainsi de gagner sa vie.

En appel, Pitl suggérait entre autres que la portée territoriale de 4 kilomètres prévue dans la clause de non-concurrence était nécessairement raisonnable puisqu’elle était prévue dans un contrat type de l’ACDQ. En effet, il s’expliquait mal que cette dernière offre à ses membres des contrats types contenant des clauses déraisonnables allant à l’encontre de leurs intérêts.

La Cour d’appel n’a pas retenu cet argument

Premièrement, elle a fait valoir que, même si elle met à la disposition de ses membres des contrats types, l’ACDQ leur recommande de la consulter afin de convenir d’une clause de non-concurrence. Cela permet à ses membres d’établir les limitations nécessaires à la protection de leurs intérêts légitimes spécifiques et d’ainsi éviter que les tribunaux invalident la clause.

Deuxièmement, la Cour d’appel a noté que la signature du contrat ne permettait pas d’écarter l’invalidité de la clause de non-concurrence. En effet, il n’était pas nécessaire, pour protéger les intérêts légitimes de Pitl et de son centre dentaire, de prévoir une portée territoriale de 4 kilomètres. Lors de son témoignage, celui-ci avait d’ailleurs affirmé qu’un rayon de 2 kilomètres aurait été suffisant. Au surplus, rappelons que le contrat avait été signé pour assurer une sécurité professionnelle à Grégoire et non parce que Pitl jugeait lui-même qu’un tel contrat était nécessaire pour la protection de ses intérêts ou de ceux de son centre dentaire.

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