Selon l’Association des allergologues et immunologues du Québec, il n’existe actuellement pas de race hypoallergène de chats ou de chiens. Tous ont la protéine allergène sur leur peau et leur poil ainsi que dans leur urine et leur salive.

Si ces allergènes se retrouvaient sur les lieux du travail et engendraient une réaction allergique, une lésion professionnelle pourrait-elle être reconnue? Possiblement. 

La jurisprudence assimile souvent l’exposition à des allergènes dans le milieu de travail à un événement imprévu et soudain si celle-ci est ponctuelle ou aux risques particuliers du travail si elle est fréquente et en lien avec le travail (Bélanger).

Dans les 2 décisions qui suivent, c’est au moyen de la définition d’un accident du travail que les réclamations des travailleuses ont été reconnues. Dans les 2 cas, le Tribunal administratif du travail a considéré qu’il était en présence d’un événement imprévu et soudain «au sens élargi», lequel avait entraîné les conditions diagnostiquées chez les travailleuses.

L’enseignante au primaire (Girard)

Les faits :

  • La travailleuse enseignait dans la même école depuis 7 ans;
  • Elle était allergique aux squames de chats, à l’armoise vulgaire de même qu’aux pissenlits;
  • Ses signes allergiques étaient habituellement exacerbés à la rentrée scolaire, étant donné la période de l’année, mais la travailleuse parvenait à les contrôler;
  • Il en a été autrement lors de la rentrée scolaire 2015 alors que le tiers de ses élèves de 3eannée du primaire possédaient un ou plusieurs chats;
  • La travailleuse était en contact tant avec les enfants qu’avec leurs vêtements et leurs effets scolaires tout au long de la journée, dans un espace plutôt confiné;
  • Dès le 30 septembre, elle a dû consulter d’urgence son médecin;
  • Un diagnostic d’allergie aux chats et d’urticaire allergique a été posé, et un arrêt de travail a été prescrit.

La décision du Tribunal administratif du travail :

La juge administrative a conclu que la travailleuse avait subi un accident du travail.

Dans un premier temps, elle a retenu que la travailleuse avait exercé son emploi dans des conditions de travail inhabituelles, voire exceptionnelles, correspondant à la survenance d’un événement imprévu et soudain.

[75]  Cependant, aux mois d’août et septembre 2015, les conditions de travail dans lesquelles elle évolue habituellement sont modifiées de manière significative puisque plus d’un tiers des élèves de sa classe possèdent un ou plusieurs chats.

[76]  L’on doit donc inférer de la preuve qu’il s’agit d’une situation inhabituelle et exceptionnelle lorsqu’elle est comparée aux rentrées antérieures ainsi qu’à celle de 2016, alors que son groupe d’élèves compte seulement deux élèves possédant un chat chacun.

[Les soulignements sont de la soussignée.]

Dans un second temps, la juge administrative a retenu que la preuve comportait suffisamment d’éléments graves, précis et concordants permettant d’établir une relation entre la composition du groupe d’élèves lors de la rentrée 2015 et l’aggravation de l’allergie de la travailleuse ainsi que l’apparition de l’urticaire l’accompagnant.

L’agente des services correctionnels (Miville-Hamilton)

Les faits :

  • La travailleuse, qui occupait habituellement des fonctions d’agente des services correctionnels, était en libération syndicale;
  • Elle était investiguée pour une condition asthmatique et souffrait d’allergies saisonnières au pollen mais ne savait pas qu’elle était notamment allergique aux chiens;
  • Elle a dû recevoir des soins d’urgence après avoir flatté le chien pisteur qu’elle surveillait à la demande d’une collègue et avoir été léchée par lui;
  • Des diagnostics de rhinite-conjonctivite et de bronchospasme ont été posés.

La décision du Tribunal administratif du travail :

Le juge administratif a conclu que la travailleuse avait subi un accident du travail.

Il a retenu qu’elle avait exercé son emploi dans des conditions inhabituelles, lesquelles sont assimilables à un événement imprévu et soudain.

[60] […] le Tribunal considère que dans les circonstances, l’exposition à la chienne s’est produite dans des circonstances particulières et inhabituelles qui peuvent dans les circonstances être assimilées à un accident du travail au sens de la loi.

[61]  Il n’était certes pas prévu que la travailleuse ait à garder la chienne de la collègue à l’occasion de l’exécution de son travail sur les rapports d’enquêtes et que cette chienne la lèche. Il s’agit là que de conditions de travail particulières qui rencontrent la définition large et libérale de l’accident du travail.

[Les soulignements sont de la soussignée.]

C’est par le recours à la présomption de faits que le juge administratif a conclu que le contact avec la chienne était la cause la plus probable de la rhinite-conjonctivite et du bronchospasme diagnostiqués chez la travailleuse.

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