Alors que la technologie fait partie intégrante de notre vie, le système judiciaire peine depuis plusieurs années à l’intégrer à ses pratiques. Conscient de cette situation, le gouvernement du Québec avait amorcé en 2018 un projet de modernisation.

Ce virage technologique a donc débuté il y a 2 ans, mais de tels changements ne peuvent s’instaurer du jour au lendemain. N’oublions pas qu’il n’y a pas si longtemps les greffiers ne travaillaient pas systématiquement avec des ordinateurs, les dossiers étaient transportés d’une salle à l’autre et les accusés, détenus ou non, ainsi que les témoins devaient obligatoirement se présenter en personne dans les salles d’audience.

Or, l’état d’urgence sanitaire dans lequel nous vivons actuellement a permis d'explorer de nouvelles façons de faire. «Le contexte actuel est une occasion pour nous de peser sur l'accélérateur, d'aller plus vite», explique Me Alex Pothier, porte-parole du ministère de la Justice.

La jurisprudence selon cette nouvelle réalité

Alors qu’au début de l’année 2020 certains juges refusaient d’utiliser la visioconférence afin d’éviter le déplacement de témoins habitant dans des régions éloignées au Québec (Hudon), des demandes de remise sont maintenant rejetées puisque cette technologie peut être utilisée (Fontaine).

Un premier procès virtuel en droit de la famille a d’ailleurs eu lieu, dans le district de Trois-Rivières, au cours duquel chacune des parties était à son domicile ou à son bureau. Des audiences en droit de la jeunesse ont également été tenues d’une façon virtuelle dans le district de Québec.

Par ailleurs, en matière d’arbitrage, certains arbitres sont aussi enclins à utiliser des outils technologiques afin de procéder dans des dossiers, tels que les conférences téléphoniques ou les visioconférences (Groupe TVA inc.).

Procédures électroniques

Le 27 mars dernier, un arrêté de la juge en chef du Québec et de la ministre de la Justice a permis aux huissiers de signifier un acte de procédure par un moyen technologique. Concrètement, cela signifie que, plutôt que de recevoir une procédure judiciaire par huissier au bas de votre porte, vous pourriez la recevoir par courriel.

De plus, certains tribunaux qui avaient entrepris des projets de transformation numérique accélèrent maintenant leur déploiement pour faciliter la vie des justiciables en cette période de crise. C’est le cas de la Cour d’appel du Québec, qui a lancé, le 9 avril dernier, un projet pilote pour le dépôt des demandes de permission d’appels en matière civile.

N’est-ce qu’un début?

Une question se pose: au retour à la «vie normale», le système judiciaire continuera-t-il à recourir à des moyens technologiques?

Plusieurs intervenants le souhaitent, alors que d’autres soulèvent certaines inquiétudes quant à l’utilisation de ces outils: on a évoqué divers problèmes techniques, liés au son ou aux enregistrements, par exemple, ainsi que des craintes quant à l’évaluation de la crédibilité des témoins ou à l’utilisation des preuves sur papier. 

Des nombreux questionnements et des adaptations sont à prévoir. Toutefois, cette pandémie, qui a apporté avec elle de nombreux bouleversements, pourra peut-être devenir un levier important pour amener notre système de justice à l’ère moderne?

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