« La demande de garde en établissement présentée en vertu de l’article 27 du Code civil du Québec ne constitue pas un mécanisme alternatif de mise en œuvre de la Loi sur la santé publique. »

C’est ce qu’a rappelé le juge Huppé dans une récente décision.

Le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Nord-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS) voulait être autorisé à garder provisoirement le défendeur en établissement afin qu’il y subisse une évaluation psychiatrique. Ce dernier a été admis à l’Hôpital Fleury le 1er janvier dernier et a été placé en garde préventive. Trois jours plus tard, un médecin a conclu qu’une ordonnance de garde provisoire était nécessaire.

L’audience a eu lieu par visioconférence et le défendeur, qui est malentendant, a répondu aux questions de son procureur par texto, à partir de son lit d’hôpital. Ce bref témoignage a permis de constater qu’il est lucide et en mesure d’interagir avec autrui en utilisant un moyen approprié à son handicap. Il refuse de continuer à être hospitalisé.

La demande du CIUSSS est fondée sur l’article 27 du Code civil du Québec. Les conditions d’application de cette disposition sont les suivantes:

  • La personne doit présenter un danger pour elle-même ou pour autrui;
  • Ce danger doit être relié à son état mental;
  • Le tribunal doit avoir des motifs sérieux de conclure à l’existence d’un tel danger;
  • Le pouvoir conféré au tribunal d’ordonner la garde en vue d’une évaluation psychiatrique est discrétionnaire.

Il doit donc obligatoirement y avoir un lien entre le danger et l’état mental de la personne visée par la demande.

Quant aux «motifs sérieux», ils proviennent le plus souvent du comportement de la personne ou d’un changement récent dans celui-ci ou dans son attitude, tels des actes de violence inexplicables, une modification substantielle de l’humeur ou une perte manifeste de contact avec la réalité.

La personne n’a pas à justifier son refus de consentir à une évaluation psychiatrique ni à démontrer sa santé mentale.

En l’espèce, la preuve présentée par le CIUSSS quant au danger que pourrait représenter le défendeur se limite au fait qu’il est atteint de la COVID-19 et qu’il ne respecte pas les consignes de confinement. Avoir contracté la COVID-19 entraîne un risque pour les personnes avec lesquelles il peut être en contact, mais ce danger ne découle pas de son état mental. Ce sont plutôt les dispositions de la Loi sur la santé publique qui régissent cette situation.

Il incombe donc aux autorités publiques de prendre les mesures appropriées pour protéger la population québécoise si le défendeur représente un danger en raison du fait qu’il est atteint de la COVID-19.

Pour en savoir plus sur les ordonnances de garde provisoire rendues dans le contexte de pandémie actuel, je vous invite à lire mon billet de mai 2020

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