Dans un rapport d’investigation rendu public au début du mois d’octobre dernier, le coroner Arnaud Samson formule18 recommandations pour mieux protéger la vie des signaleurs routiers. Ce rapport concerne le décès d’un signaleur routier survenu en juillet 2024 lorsqu’il a été happé par un camion semi-remorque à la sortie d’un chantier de construction résidentiel où il dirigeait la circulation. La section «Considérations sur la sécurité au travail des signaleurs routiers» du rapport comporte notamment une liste des cas de décès chez les signaleurs routiers entre 2019 et 2025. Parmi ces cas figure celui d’un travailleur décédé au mois d’octobre 2022, lequel a récemment fait l’objet de décisions de la Cour du Québec, l’une portant sur la responsabilité pénale de l’employeur, l’autre sur la peine devant lui être imposée à la suite d’une déclaration de culpabilité.
Ce signaleur routier travaillait pour une entreprise spécialisée dans les travaux d’excavation et de nivellement et contrôlait l’accès à l’une des extrémités d’un chantier lors de l’accident mortel dont il a été victime. Un véhicule qui s’était approché du chantier à une vitesse d’environ 70 à 80 kilomètres à l’heure l’a heurté de plein fouet. L’employeur, qui agissait à titre de maître d’œuvre, a été déclaré coupable d’une infraction à l’article 237 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, plus précisément d’avoir compromis directement et sérieusement la santé, la sécurité ou l’intégrité physique d’un travailleur lors de travaux de signalisation. L’employeur a porté ce jugement en appel et le dossier est pendant.
Par ailleurs, dans un jugement rendu au mois d’août dernier, la Cour s’est prononcée sur l’amende devant être imposée à l’employeur. La peine maximale prévue à la Loi sur la santé et la sécurité du travail à la date de l’infraction était de 72 637 $. Alors que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) réclamait une amende de 43 580 $, l’employeur s’en est vu imposer une de 35 000 $.
La Cour a rappelé que l’employeur avait manqué à ses obligations à plusieurs étapes du chantier puisqu’il avait omis de planifier adéquatement les mesures de sécurité requises et de les mettre en œuvre. Elle a considéré que ce manquement constituait une circonstance aggravante, compte tenu du fait que les signaleurs routiers sont exposés à de nombreux dangers en raison de la nature de leur travail.
Dans ses conclusions, la Cour s’est exprimée en ce qui a trait à l’extrême importance du respect des règles de sécurité dans ce domaine d’activités, interpellant à cet égard tant l’employeur en cause et les entreprises faisant appel aux services des signaleurs routiers que la population en général:
«La vulnérabilité des signaleurs routiers milite […] en faveur du respect scrupuleux des règles de sécurité et des mesures mises en place les concernant. Seule une peine dissuasive permettra d’atteindre cet objectif qui ne laisse place à aucun compromis. Tant la défenderesse que les entreprises requérant les services de signaleurs routiers doivent en être conscients.
Finalement, selon le témoignage non contredit de [la gérante de projet de l’employeur], plusieurs intervenants savaient que les circonstances dans lesquelles les signaleurs routiers exécutaient leur travail n’étaient pas conformes ou prévues aux divers documents préparés et utilisés dans le cadre du chantier. Cela milite également en faveur d’une peine élevée afin de souligner la haute réprobation sociale et favoriser une conscientisation collective face aux dangers guettant les signaleurs routiers.» (paragr. 35 et 36)
[Caractères gras ajoutés.]
Cette affaire demeure à suivre, compte tenu de l’appel dont fait l’objet le jugement ayant prononcé la culpabilité de l’employeur.
Demeure également à suivre ce qu’il adviendra des 18 recommandations formulées par le coroner Samson à l’endroit de divers organismes, dont le ministère des Transports et de la Mobilité durable et la CNESST, afin de rehausser la sécurité au travail des signaleurs routiers au Québec.