La Presse Canadienne rapportait récemment que le Parti vert du Canada invite les citoyens à surveiller l’état des rails près de chez eux et à partager des photos de voies ferrées sur Twitter, et ce, dans le but de bloquer le passage de trains de produits dangereux. Avant de répondre à cet appel à tous, une mise en garde s’impose. Cette surveillance citoyenne est-elle légale?
Dans Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Casemajor, la défenderesse était accusée d’avoir contrevenu à l’article 26.1 de la Loi sur la sécurité ferroviaire, qui interdit de pénétrer, sans excuse légitime, sur l’emprise d’une ligne de chemin de fer.
Militante pour l’aménagement de passages à niveau pour piétons entre quartiers limitrophes, la défenderesse parcourt les environs d’un chemin de fer afin d’y prendre des photos et documenter sa revendication. Selon elle, la vétusté ou la dangerosité des installations (trottoirs et tunnels) ainsi que l’importance de sa mission l’excusent d’avoir pénétré sur l’emprise du chemin de fer.
L’excuse légitime s’évalue en fonction de l’objectif visé par l’infraction reprochée et l’erreur de droit ou la bonne foi ne peuvent l’engendrer. De plus, l’explication offerte ne doit pas mettre en péril la valeur protégée par la loi.
En l’espèce, l’objectif de l’article 26.1 de la loi est de réduire le nombre d’accidents et de morts attribuables aux intrusions sur les voies ferrées. L’acte posé par la défenderesse n’était pas inévitable. D’autres choix s’offraient à elle et lui permettaient de parvenir à ses fins sans contrevenir à la loi. Elle aurait pu prendre des photos à partir de l’autre côté des clôtures, à l’extérieur de l’emprise. De plus, elle n’a jamais demandé d’autorisation auprès des autorités compétentes.
Le juge a conclu que l’argument de la défenderesse tenait plutôt de la revendication et du débat public que de l’excuse légitime au sens de la loi.
En bref, l’installation de passages à niveau pour piétons est peut-être souhaitable, mais pénétrer sur l’emprise des voies ferrées dans l’espoir de l’imposer est contraire à la loi. La défenderesse a donc été déclarée coupable de l’infraction reprochée.
Référence
Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Casemajor (C.Q., 2015-06-04), 2015 QCCQ 4835, SOQUIJ AZ-51182404. À la date de diffusion, la décision n’avait pas été portée en appel.
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