En ce mois de l’amour et avec le vent de dénonciation relativement aux crimes à connotation sexuelle qui a eu lieu durant l’année 2017 et qui se poursuit en 2018, j’imagine que le principe «Non, c’est non !» ne vous est pas inconnu. Toutefois, qu’arrive-t-il lorsque la situation n’est pas aussi claire ? Cette notion si importante peut malheureusement s’avérer délicate et complexe dans plusieurs cas.
Pas de «non», mais… ambiguïté du consentement
Le Code criminel établit que le consentement à toute activité sexuelle, y compris un simple baiser, doit être donné de façon libre et éclairée ainsi que par une personne qui n'est notamment pas intoxiquée par la drogue ou par l'alcool. Il doit donc être manifesté par des paroles ou des gestes. Le simple fait de ne rien dire, par exemple, n’établit pas un consentement valide.
La Cour du Québec a récemment confirmé ce principe dans R. c. Excellent. Dans ce dossier, l’accusé avait rencontré la victime dans un bar à la fin d’une soirée. Alors qu’il ne la connaissait pas du tout, celle-ci l’a embrassé. Il lui a donc demandé si elle aimerait se rendre dans un endroit plus intime, et elle lui a répondu par un « hum, hum ». Il a décidé de l’emmener chez lui et ils ont une relation sexuelle.
Celle-ci a minimalement participé à l’activité : elle a enlevé ses vêtements avec de l’aide, a dit des « hum, hum » et des « babe », elle a embrassé l’accusé et a mis ses mains en arrière de lui lors de la pénétration. Elle a fini par le repousser et a uriné dans le lit.
Même si l’accusé avait indiqué croire sincèrement que la victime avait consenti à cette relation, le Tribunal a conclu qu’il avait plutôt choisi de profiter de la vulnérabilité évidente de sa partenaire, et ce, en toute connaissance de cause. L’accusé, qui maintient toujours sa croyance sincère au consentement, a alors décidé de porter cette décision en appel. Seul l’avenir pourra nous indiquer si la Cour d’appel confirmera ou non le jugement rendu en première instance (appel sur la culpabilité, 2017-12-11 (C.A.), 500-10-006586-174).
«Oui» et «non» : on peut changer d’idée
La notion de «consentement» implique aussi que les partenaires « disent oui » à toutes les étapes de celle-ci. En effet, il est toujours possible de changer d’idée.
La Cour suprême du Canada, dans R. c. J.A., a confirmé que les partenaires devaient être capables de choisir de participer à toutes les étapes de l’activité sexuelle. Dans ce dossier, la victime était d’accord pour avoir une relation sexuelle avec l’accusé et avait accepté d’être étranglée pendant celle-ci. Lors de son réveil, l’accusé lui introduisait un godemiché dans l’anus. Il a été déclaré coupable d’agression sexuelle puisque, même si la victime avait déjà consenti à cette pratique, elle n’avait pas donné son consentement lors des événements en cause.
Par ailleurs, ce n’est pas parce qu’une personne a déjà consenti à une relation sexuelle que son consentement demeure valide pour d’autres relations, et ce, même si les partenaires sont dans une relation de couple ou d’ « amis modernes », comme c’était le cas dans R. c. Bouchard.
Un «oui» qui veut dire «non» : inadmissibilité du consentement
L’âge minimal reconnu par le Code criminel pour consentir à une activité sexuelle (qu’il s’agisse de baisers, de caresses ou de relations sexuelles complètes) est de 16 ans. Toutefois, le consentement de la victime ne sera pas valide si :
- La personne accusée était en situation d'autorité ou de confiance;
- Le jeune était en situation de dépendance à l'égard de la personne accusée;
- La personne accusée était dans une relation où elle exploitait le jeune.
Par ailleurs, en appliquant les mêmes conditions que ci-dessus, les enfants âgés de 12 ou 13 ans peuvent consentir à des activités sexuelles entre eux si la différence d’âge est d’au plus 2 ans alors que, pour des enfants âgés de 14 ou 15 ans, l’écart autorisé est d’au plus 5 ans.
Ainsi, il est intéressant de constater que, lorsqu’il est question d’évaluer l’admissibilité d’un consentement, la loi ne considère pas l’accord des parents ni le fait que les relations soient dépourvues de toute violence physique extrinsèque ou de pression psychologique.
Dans R. c. Jomphe, l’accusé l’a malheureusement appris à ses dépends. En effet, il a été déclaré coupable d’agression sexuelle alors qu’il avait fréquenté la victime, âgée de 13 ans, pendant 3 mois et que leurs mères respectives approuvaient cette relation. Celui-ci était alors âgé de 18 ans.
Des défenses possibles ?
Puisque les conséquences d’une agression sexuelle sont indélébiles, qu’elles marqueront à jamais les victimes et que l’ignorance de la loi ne constitue pas une défense, il vaut mieux prendre tous les moyens nécessaires pour s’assurer de l’âge de son partenaire et de son réel consentement par des paroles et des gestes non équivoques.
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