À une époque où les gens prennent des photographies de leur repas et publient une multitude d’égoportraits («selfies») sur les réseaux sociaux, il n’est pas surprenant d’apprendre qu’ils enregistrent aussi sur vidéo leurs relations sexuelles. Toutefois, cette pratique ne doit pas être faite à l’insu de son partenaire.

Dans l’affaire L.D. c. J.V., la demanderesse, qui savait que le défendeur possédait des enregistrements vidéo de ses relations intimes avec d’autres partenaires, s’est assurée auprès de ce dernier qu’il ne la filmerait pas. Or, un jour où le défendeur était absent, la demanderesse a pris possession de ses clés USB pour visionner leur contenu sur l’ordinateur portable situé dans l’aire commune de l’appartement de celui-ci. Au même moment, les deux copines de la demanderesses sont arrivées sur les lieux. Lors de ce visionnement, elles ont toutes trois découvert avec horreur et stupéfaction un enregistrement vidéo d’une relation intime entre les parties. Cet enregistrement avait été fait de façon subreptice, par un appareil photo sur lequel le défendeur avait désactivé le voyant indiquant que l’appareil était en marche.

Le juge Granosik a conclu que l’enregistrement en question, fait non seulement sans le consentement de la demanderesse, mais à son insu et de façon subreptice, constituait une atteinte à son droit à la vie privée, à son honneur, à sa dignité ainsi qu’à sa réputation. N’ayant pas protégé adéquatement par des moyens physiques ou informatiques l’enregistrement vidéo, il a également statué que le défendeur avait commis une faute en permettant la diffusion entre autres aux amies de la demanderesse.

L’enregistrement des relations intimes à l’insu de son partenaire constitue un geste particulièrement ignoble et dégradant pour son auteur, mais aussi horrifiant pour sa victime. En l’espèce, il n’a pas été prouvé que ces images avaient été diffusées sur Internet, mais le fait que le défendeur avait toujours en sa possession une copie de l’enregistrement avant qu’il ne soit remis à la demanderesse peut donner lieu à une crainte raisonnable que d’autres copies existent et qu’elles pourraient être visionnées par des tiers. La demanderesse a donc eu droit à 29 000 $ à titre de dommages moraux ainsi qu’à 3 000 $ en dommages punitifs.

Les sommes versées à cette dernière sont importantes, mais espérons qu’elles auront pour effet de dissuader les personnes qui seraient incitées à capter les moments intimes de leur vie dans des circonstances similaires!

Références

 L.D. c. J.V. (C.S., 2015-03-12), 2015 QCCS 1224, SOQUIJ AZ-51163276.

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