Vos enfants sont de retour à l'école ou commencent leur parcours scolaire. Vous les confiez à leur(s) professeur(s) en espérant une belle et bonne année. Mais… savez-vous bien à qui vous les confiez? Pouvez-vous être totalement en confiance? La Loi sur l'instruction publique prévoit des mécanismes de vérification des antécédents judiciaires pour ceux qui détiennent une autorisation d'enseigner et pour ceux qui désirent obtenir une telle autorisation. Voici quelques cas qui se sont retrouvés devant les tribunaux.
Le droit
Tout d'abord, l'article 34.3 de la loi indique que le ministre de l'Éducation peut refuser de renouveler une autorisation d'enseigner, la suspendre, la révoquer ou la maintenir sous conditions si son titulaire «a été déclaré coupable d’une infraction criminelle ou pénale commise au Canada ou à l’étranger qui, de l’avis du ministre, a un lien avec l’exercice de la profession enseignante, sauf si un pardon a été obtenu pour cette infraction».
Il doit donc exister un lien entre l'infraction criminelle et l'exercice de la profession d'enseignant.
De plus, il est bien établi par la jurisprudence que l'enseignant a un rôle de modèle. Il occupe une position de confiance, d'influence et d'autorité à l'égard des élèves qui lui sont confiés. Il ne transmet pas seulement des connaissances, mais aussi des valeurs généralement reconnues et prônées par la société. II a le devoir de se comporter de façon compatible avec son rôle de modèle. Il doit se conformer à des normes élevées au travail comme à l'extérieur du travail.
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Voies de fait à l’endroit d’un élève
- Les faits : L'enseignante a plaidé coupable sous une accusation de voies de fait sur la personne de l'un de ses élèves et a obtenu une absolution inconditionnelle. Le ministre lui a imposé une condition pour le maintien de son autorisation d'enseignement, soit de suivre un cours universitaire sur l'intervention auprès des élèves en difficulté d'adaptation. L'enseignante a également été suspendue sans solde pour une période de 5 jours.
- Décision du Tribunal administratif du Québec (TAQ): Il y a un lien entre l'emploi et l'infraction. Dans les circonstances de l'affaire, l'absolution inconditionnelle équivalait à un pardon. L'enseignante continue de mériter la confiance du public malgré la déclaration de culpabilité. Elle excelle dans l'exercice de sa profession. Il est faux de prétendre qu'elle n'est pas suffisamment outillée pour intervenir adéquatement auprès des clientèles présentant des difficultés d'adaptation. En conséquence, la condition imposée par le ministre est annulée et il y a lieu d'y substituer une suspension de 5 jours concurrente à celle déjà imposée.
Drogue
- Les faits : L'enseignant a plaidé coupable à des infractions de production et de possession de GHB en vue d'en faire le trafic. Il a été condamné à 30 mois de détention. Le ministre a révoqué son autorisation d'enseigner.
- Décision du TAQ: Il s'agit d'infractions relatives au GHB, une drogue illégale ayant un haut potentiel de dangerosité et des effets néfastes reconnus. De plus, cette substance est notamment utilisée dans des infractions de nature sexuelle et est d'ailleurs communément appelée la «drogue du viol». Il y a un lien entre les infractions commises et la profession d'enseignant. Les infractions pour lesquelles l'enseignant a été déclaré coupable ternissent son image et entravent la confiance des élèves, des parents et du public en général envers lui dans son rôle d'enseignant et de modèle de comportement auprès d'élèves mineurs. Il importe peu que les actes reprochés se soient produits à l'extérieur du milieu scolaire, hors de la présence des élèves et hors des heures de travail. L'effet de ces gestes s'évalue plutôt en fonction du statut de l'enseignant. En raison de la position de confiance qu'il occupe, de l'influence et de l'autorité morale qu'il exerce sur les élèves, son comportement influe directement sur la perception du public de sa capacité de détenir une telle position et, surtout, sur la confiance de celui-ci dans le système scolaire en général. En optant pour la criminalité et en s'adonnant à des activités criminelles, l'enseignant a fait fi des valeurs qu'il se devait d'incarner et de promouvoir. Par cela, il a enfreint son devoir d'aider ses élèves à acquérir «le respect des droits de la personne», tel que le prévoit l'article 22 de la loi. La décision ayant révoqué son autorisation d'enseigner est bien fondée.
Infractions d'ordre sexuel
- Les faits : Un enseignant dans une école secondaire a plaidé coupable sous des accusations d'avoir communiqué au moyen d'un ordinateur avec des jeunes filles de moins de 16 ans, dont certaines étaient ses élèves, en vue de faciliter la perpétration à leur égard d'infractions d'ordre sexuel. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de 6 mois et a fait l'objet d'une ordonnance de probation de 2 ans. Le ministre a révoqué son autorisation d'enseigner.
- Décision du TAQ: Bien que la faute, soit celle de transmettre son adresse courriel à ses étudiants, ait été commise à l'aube du congé sabbatique de l'enseignant, la relation maître-élève est née dans le cadre de son enseignement et au moment où il exerçait sa fonction d'enseignant. Elle s'est ainsi prolongée au-delà de l'année scolaire et a duré pendant toute l'année civile. Lorsqu'un parent confie son enfant à un établissement scolaire et, par le fait même, à un professeur donné, il s'attend à une conduite irréprochable de ce dernier, qui représente un modèle pour l'enfant. Les infractions pour lesquelles l'enseignant s'est déclaré coupable sont donc liées à sa profession et constituent une faute qui porte atteinte à l'honneur et à la dignité de la fonction enseignante. La révocation de l'autorisation d'enseigner est confirmée.
- Les faits : Un enseignant a été accusé d'avoir agressé sexuellement une adolescente de 17 ans et d'avoir touché une partie du corps de celle-ci à des fins sexuelles alors qu'il était en situation d'autorité ou de confiance. Il n'était pas son professeur puisqu'elle n'étudiait pas à l'école où il enseignait. Il a été acquitté sous les 2 chefs d'accusation. Le juge de la Cour du Québec a conclu à l'existence d'un doute raisonnable quant au fait que le consentement de l'adolescente aurait été arraché par la peur, par la crainte ou pour toute autre raison. Il a également conclu qu'il n'existait pas de relation créant une situation d'autorité et de confiance, soit une relation de professeur à élève, entre l'enseignant et l'adolescente. Suivant l'avis d'un comité d'enquête, le ministre a conclu à une faute grave à l'occasion de l'exercice de la fonction d'enseignant et a révoqué le brevet du requérant
- Décision du TAQ : L'adolescente s'est présentée à une activité de financement dont l'enseignant veillait au bon déroulement. Ils se sont rencontrés pour la première fois à cette occasion et se sont mutuellement plu. L'enseignant n'agissait pas dans l'exercice de ses fonctions lorsqu'il supervisait l'activité de financement. Celle-ci avait lieu à l'extérieur de son école, hors des heures scolaires et l'adolescente n'avait jamais été son élève et ne le serait jamais. Il s'agissait d'un projet parascolaire, soit une activité en périphérie de sa fonction d'enseignant. À cette étape de la rencontre avec l'adolescente, il n'y a pas eu de faute grave commise à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Pour la suite des événements, on peut s'interroger si le fait, pour l'enseignant, d'avoir commis des gestes de nature sexuelle avec l'adolescente constitue une faute grave ou s'il s'agit seulement d'une faute, sans la qualifier de grave, dans ce cas où un homme de 34 ans, enseignant, échange des gestes de nature sexuelle avec une jeune femme. On pourrait aussi conclure que l'enseignant a manqué de jugement ou de prudence. Cette faute, ou ce manque de jugement, n'a pas été commise à l'occasion de l'exercice de la fonction enseignante. La faute grave commise dans l'exécution des fonctions vise l'acte commis dans le contexte de la relation de maître à élève. Or, tel n'était pas le cas en l'espèce. Dans ces circonstances, la décision du ministre ne pouvait être fondée. Enfin, même s'il y avait eu une faute grave dans l'exercice des fonctions, la sanction imposée de révoquer l'autorisation d'enseigner était déraisonnable. Il s'agissait là de la sanction ultime, qui aurait pu trouver un sens si l'enseignant avait été reconnu coupable d'infractions et si un lien avait été établi entre celles-ci et l'exercice de la profession d'enseignant. En l'espèce, les circonstances relevaient du domaine de la vie privée.
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