Même si vous habitez votre logement depuis des années et que vous bénéficiez du droit au maintien dans les lieux en vertu de l’article 1936 du Code civil du Québec (C.C.Q.), vous pouvez être évincé si le locateur de votre logement désire le reprendre. Dans le présent billet, il sera question de ce droit du locateur.
Que dit la loi ?
L’article 1957 C.C.Q. prévoit que le locateur d’un logement, s’il en est le propriétaire, peut le reprendre pour :
- l’habiter lui-même;
- y loger ses ascendants ou descendants au premier degré (ses enfants ou ses parents);
- y loger tout autre parent ou allié dont il est le principal soutien (un allié est une personne parente avec le conjoint (par mariage ou union civile) du locateur) ;
- y loger un conjoint dont il demeure le principal soutien après la séparation de corps, le divorce ou la dissolution de l’union civile.
Comme cet article fait état de liens à caractère familial, le locateur doit être une personne physique. Quant au sens à donner à l'expression «principal soutien», il doit être large et général. Il ne s’agit donc pas uniquement du soutien financier, mais aussi du soutien moral, psychologique, familial et social que le locateur peut apporter au bénéficiaire de la reprise.
Toutefois, depuis le 10 juin 2016, l'article 1959.1 C.C.Q. protège les aînés dans le contexte d’une reprise de possession, sous réserve de remplir certaines conditions :
Le locateur ne peut reprendre un logement ou en évincer un locataire lorsque ce dernier ou son conjoint, au moment de la reprise ou de l’éviction, est âgé de 70 ans ou plus, occupe le logement depuis au moins 10 ans et a un revenu égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d’être admissible à un logement à loyer modique selon le Règlement sur l’attribution des logements à loyer modique (chapitre S-8, r. 1).
Il peut toutefois reprendre le logement dans l’une ou l’autre des situations suivantes:
1° il est lui-même âgé de 70 ans ou plus et souhaite reprendre le logement pour s’y loger;
2° le bénéficiaire de la reprise est âgé de 70 ans ou plus;
3° il est un propriétaire occupant âgé de 70 ans ou plus et souhaite loger, dans le même immeuble que lui, un bénéficiaire âgé de moins de 70 ans.
La Société d’habitation du Québec publie sur son site Internet les seuils de revenu maximal permettant à un locataire d’être admissible à un logement à loyer modique.
Récemment, la Régie du logement a conclu que, malgré l'âge du locataire (72 ans) et le fait qu'il résidait au logement depuis 10 ans, la locatrice pouvait obtenir la reprise de celui-ci en raison de son propre âge (80 ans) et de son intention de s'y loger.
Dans Perez c. Levin, la Cour du Québec a confirmé que, dans la mesure où une personne âgée de 70 ans ou plus en est bénéficiaire, le deuxième cas d'exception permet la reprise même si d'autres personnes, qui elles sont âgées de moins de 70 ans, en bénéficient. Ainsi, pour être autorisée, la reprise n'a pas à être au bénéfice exclusif d'une personne âgée.
L’avis de reprise
Le locateur qui désire reprendre le logement du locataire doit aviser celui-ci dans les délais indiqués à l’article 1960 C.C.Q. Quant à l’avis de reprise, il doit contenir les informations énoncées à l’article 1961 C.C.Q.
1960. Le locateur qui désire reprendre le logement ou évincer le locataire doit aviser celui-ci, au moins six mois avant l’expiration du bail à durée fixe; si la durée du bail est de six mois ou moins, l’avis est d’un mois.
Toutefois, lorsque le bail est à durée indéterminée, l’avis doit être donné six mois avant la date de la reprise ou de l’éviction.
1961. L’avis de reprise doit indiquer la date prévue pour l’exercer, le nom du bénéficiaire et, s’il y a lieu, le degré de parenté ou le lien du bénéficiaire avec le locateur.
L’avis d’éviction doit indiquer le motif et la date de l’éviction.
Ces avis doivent reproduire le contenu de l’article 1959.1.
La reprise ou l’éviction peut prendre effet à une date postérieure à celle qui est indiquée sur l’avis, à la demande du locataire et sur autorisation du tribunal.
La loi ne requiert pas d'indiquer dans l'avis de reprise le nom de toutes les personnes qui vivront avec le bénéficiaire; il suffit que celui-ci soit l'une des personnes indiquées à l'article 1957 C.C.Q.
Refus du locataire
Lorsque le locataire refuse de quitter le logement, le locateur peut néanmoins le reprendre avec l'autorisation du tribunal. Le locateur devra alors «démontrer qu'il entend réellement reprendre le logement pour la fin mentionnée dans l'avis et qu'il ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins» (art. 1963 C.C.Q.).
Dans Medeiros c. Ciccariello, le locateur n’a pu obtenir la reprise de possession du logement du locataire afin d'y loger sa fille puisque la preuve a révélé que ce projet constituait plutôt une stratégie pour évincer le locataire, considéré comme indésirable.
Indemnité
Lorsque le tribunal autorise la reprise, il peut imposer les conditions qu'il estime justes et raisonnables, y compris le paiement au locataire d'une indemnité équivalant aux frais de déménagement (art. 1967 C.C.Q). À la lumière de la jurisprudence, l’indemnité accordée au locataire varie entre 1 500 $ et 2 000 $. Une telle somme permet de couvrir les frais du transport des biens garnissant le logement, les frais de branchement aux services publics et ceux des suivis postaux.
Le juge administratif Gagnier, de la Régie du logement, a estimé que l'attribution de dommages-intérêts, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit — tels la durée de l'occupation, l'enracinement dans le quartier ainsi que la perte de temps pour trouver un autre logement et pour déménager, pourtant pris en considération dans certaines décisions —, n'est pas compatible avec le droit applicable.
Mauvaise foi du locateur
Enfin, lorsque la reprise est exercée de mauvaise foi par le locateur, le locataire peut réclamer des dommages-intérêts et des dommages punitifs à ce dernier (art. 1968 C.C.Q.). À titre d’exemple, dans Ostigny c. Manganelli, le locataire a eu droit à 7 500 $ en dommages-intérêts et en dommages moraux ainsi qu'à 6 000 $ en dommages punitifs.
Et si un propriétaire décidé de reprendre une parti du viens louer en cours de bail et vide les effets du locataire lui même … Pour y mettre seulement les biens matériel du propriétaire .
Je crois qu’il y a beaucoup de reprise de mauvaise foi, et façon de contourner la loi, soit la conversion horizontale, comme ce fut notre cas. La ville a tout intérêt à la conversion des logements locatifs en condo, c’est la première porte d’entrée, ensuite il y a des propriétaires qui n’encaisse pas les chèques sciemment pour prendre en défaut les locataires, moi j’ai eu jusqu’à subir de l’invasion de domicile, et qui fait quoi ? Personne ? On attend que le crime soit effectué pour ensuite faire une enquête, comme ce fut le cas de la fillette à Granby, et pourtant combien de citoyens désireux avaient fait des signalements, et là on se décide de faire une commission d’enquête, combien d’enfants sont maltraités dans leur famille d’origine, enlevé de celle-ci et placé dans des familles d’accueil qui les maltraite à leur tour. Tant que l’humain ne sera pas au coeur des préoccupations majeures laissant toute la place à l’argent, surtout l’argent vite fait, il y a toujours des drames, et des victimes avec des séquelles…
Vous devriez parler de l’article 1958 qui stipule que si les propriétaires ne sont pas conjoints ou s’il y a plus de deux propriétaires, ils ne peuvent pas reprendre un logement.
Est ce que 2 personnes ne formant pas un couple peuvent acheter ensemble et reprendre 2 loyer pour se loger donc 1 loyer par propriétaire?
Bonjour,
Un logement (condo divis) peut0il être repris s’il y a quatre propriétaires investisseurs et que deux d’entre eux veulent l’habiter?
Si le locataire répond favorablement à l’éviction mais bien après le délai de un mois requis pour répondre?
Bonjour, y a til un mimumim de temps que le beneficiaire doit rester afin d’ecarter la mauvaise foi?
Un locataire peut-il demander une compensation monétaire au propriétaire, si le propriétaire a fait tout en règle pour reprendre sa maison à la fin du bail des locataires pour revenir dans sa maison.
SOQUIJ étant une maison d’édition, nous ne sommes pas en mesure de vous renseigner. Vous devriez visiter le site du Tribunal administratif du logement (le nouveau nom de la Régie du logement) à https://www.tal.gouv.qc.ca/fr/droit-du-locateur-de-mettre-fin-au-bail/reprise-de-logement ou communiquer avec elle pour de plus amples renseignements à ce sujet.