Souvent, la nouvelle année rime avec recherche de nouveaux défis. Voici des exemples documentés par la jurisprudence de processus d’embauche qui ont mené à des condamnations pécuniaires contre des employeurs et qui sauront vous aiguiller pour vos prochaines entrevues préembauche.

Questions d’ordre médical

Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (M.R.) c. Société de transport de Montréal (STM)

Le plaignant a reçu 51 786 $.

Le plaignant, atteint de diabète de type 2 et ayant subi une dépression dont il était complètement rétabli, était candidat à un poste de technicien en électronique.

Le Tribunal a notamment conclu que les exigences du poste en cause ne justifiaient pas qu’un candidat soit interrogé de manière discriminatoire à propos de ses problèmes de santé passés ou actuels afin de garantir la sécurité de l’employé et d’autrui. Il ne s’agissait pas d’un travail s’exerçant sur la route, ce qui pourrait expliquer l’existence de normes de sécurité accrues, comme c’est le cas pour les postes de chauffeurs d’autobus. Ainsi, de nombreuses questions figurant dans le questionnaire et certains aspects de l’examen médical étaient discriminatoires.

Par ailleurs, les exigences du poste ne justifient pas qu’un candidat soit questionné de manière discriminatoire sur des problèmes antérieurs de drogue et qu’il soit tenu de se soumettre à un test d’urine destiné à dépister un problème de toxicomanie. Il s’agit d’une recherche à l’aveuglette dans la vie privée et le profil médical d’un candidat. Les questions non nécessaires auxquelles le plaignant a dû répondre ainsi que certains aspects de l’examen médical ont également porté atteinte de façon discriminatoire au droit à la sauvegarde de sa dignité et constituaient une intrusion dans sa vie privée. Enfin, les multiples prélèvements effectués ont contrevenu à son droit au respect de son intégrité.

Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (T.J.R.) c. Procureur général du Québec (Sûreté du Québec)

Le plaignant a reçu 8 000 $.

Atteint du syndrome de Gilles de la Tourette, le plaignant prétendait notamment qu’il avait été assujetti à un processus de sélection discriminatoire pour un poste de policier, qu’il n’a finalement pas obtenu.

Certaines des questions contenues dans les différents questionnaires étaient trop larges ou n’avaient pas de lien avec les aptitudes ou les qualités requises par l’emploi de policier et elles contrevenaient à plusieurs dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne. De plus, le plaignant a subi des examens médicaux intrusifs (radiographie pulmonaire et palpation des parties génitales) qui n’étaient pas pertinents et qui portaient particulièrement atteinte, de manière discriminatoire, à son intégrité.

Toutefois, le Tribunal a conclu que l’employeur n’avait pas porté atteinte au droit du plaignant d’être traité en pleine égalité, sans égard à son handicap. En effet, les omissions volontaires du plaignant sont en lien avec des questions qui n’étaient pas discriminatoires, mais liées aux aptitudes requises par la fonction de policier. L’employeur avait le droit de poser des questions visant à déterminer la stabilité de la santé mentale du plaignant.

Étant donné que le syndrome dont il souffre est qualifié de «maladie mentale», le plaignant aurait dû le déclarer sans ambiguïté. Les bonnes mœurs et la probité sont des conditions de base que doit respecter un candidat à un poste de policier. Le handicap du plaignant n’a joué aucun rôle et n’avait aucun lien, même secondaire, avec le rejet de sa candidature.

Enfin, le Tribunal a jugé que l’employeur avait porté atteinte de manière discriminatoire au droit à la vie privée du plaignant en divulguant à des tiers le problème de santé dont il souffrait. 

Grossesse

St-Pierre c. Éditions Hurtubise inc.

La plaignante a reçu 16 250 $.

L’employeur a offert à la plaignante le poste de responsable des ventes à l’étranger pour une durée indéterminée. Il n’a pas contesté le fait qu’il avait mis fin au processus d’embauche de la plaignante parce qu’elle était enceinte; il a fait valoir qu’elle n’était pas disponible pour participer au plus gros événement de l’année.

Or, lorsque la non-disponibilité d’une employée est liée au fait que celle-ci est enceinte, le refus de lui accorder un poste ou une promotion est directement lié à sa grossesse et est donc interdit par la charte. L’employeur n’a pas établi que sa décision de mettre fin au processus d’embauche de la plaignante était justifiée du fait que les mesures d’accommodement envisagées en lien avec sa grossesse constituaient une contrainte excessive.

Ainsi, le refus d’embaucher la plaignante, en plus d’être discriminatoire parce qu’il est interdit par les articles 10 et 16 de la charte, a porté atteinte au droit de cette dernière à la sauvegarde de sa dignité, également garanti par la charte.

Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Di Campo) c. Éco-Logixx – Grossiste alimentaire et produits d’emballage inc.

La plaignante a reçu 5 000 $.

Les questions posées par l’employeur à l’occasion de l’entrevue de préembauche de la plaignante, lesquelles portaient sur l’âge, la grossesse et l’état civil, étaient à leur face même discriminatoires et ont porté atteinte à sa dignité ainsi qu’à sa vie privée.

Ainsi, la plaignante a vu son droit de bénéficier d’un processus exempt de discrimination atteint. Elle a également subi une atteinte discriminatoire à son droit à la sauvegarde de sa dignité ainsi qu’à son droit à la vie privée, en violation des articles 4, 5 et 10 de la charte.

Origine ethnique

Kerdougli c. Les Aliments Multibar inc. 

Le plaignant a obtenu 6 000 $.

Le Tribunal a conclu qu’un employeur ne doit pas interroger un candidat sur l’origine de son accent au cours de son entrevue d’embauche; il s’agit d’une question discriminatoire reliée à la race ou à l’origine ethnique de cette personne qui a pour effet de porter atteinte à sa dignité.

Le même plaignant a également obtenu 5 000 $ pour les mêmes motifs dans un autre dossier.

Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada inc.)

Le plaignant a obtenu 4 000 $.

Même si l’entrevue d’embauche officielle n’était pas commencée, la représentante de l’employeur ne devait pas poser de question sur l’origine ethnique du nom du plaignant; il s’agit d’une question discriminatoire au sens des articles 18.1 et 10 de la charte.

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