Il s’agit sans conteste d’un billet que personne ne souhaiterait écrire. Le drame qui s’est produit à la garderie de Laval le 8 février dernier a causé un traumatisme collectif et a laissé des blessures béantes. Le présent billet n’occulte pas cette réalité. Il a pour seul but d’analyser les faits sous l’angle juridique, plus précisément celui de la couverture des régimes publics d’indemnisation dans un tel cas. Qui est admissible? Et selon quel régime? Si ce billet peut être utile, ne serait-ce qu’à une seule personne, il aura atteint son but.
Les faits
À 8 h 30 le matin, le chauffeur d’un autobus de la Société de transport de de Laval a foncé dans une garderie dans un geste qui, à ce jour, semble volontaire. Deux enfants sont décédés et plusieurs autres ont été blessés.
Les personnes touchées
Sur les lieux, au moment précis de l’impact, il y avait les enfants de la garderie, les éducatrices et le chauffeur d’autobus. Des témoins se trouvaient aussi à l’extérieur, soit au moins un parent qui était allé reconduire son enfant.
Se sont ensuite notamment ajoutées les personnes venues porter secours aux enfants, les personnes qui ont maîtrisé le chauffeur en attendant l’arrivée des policiers, les parents qui venaient pour reconduire leur enfant sans être au courant du drame qui venait de se dérouler, les premiers répondants, les proches des victimes, puis, enfin, des observateurs de la scène.
D’autres personnes que celles énumérées ci-dessus peuvent être indemnisées. J’y reviendrai.
Les lois applicables
Il y a eu un accident d’automobile au sens de la Loi sur l’assurance automobile (LAA). Il y a aussi eu un acte criminel au sens de la Loi visant à aider les personnes victimes d’infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement (LAPVIC). Enfin, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) s'applique également.
Qui peut faire une demande d’indemnisation et selon quel régime?
Les tableaux ci-dessous fournissent des réponses.
Il faut bien comprendre que le fait de déposer une demande d’indemnisation n’assure pas automatiquement de recevoir des indemnités. Chaque demande doit être analysée à la lumière des circonstances particulières qui lui sont propres. Les tableaux indiquent simplement quel(s) régime(s) pourrai(en)t s’appliquer si la personne décide de déposer une demande d’indemnisation.
De plus, il faut aussi garder à l’esprit que la LAPVIC offre des «paniers de services» différents selon le statut ou la situation applicable à la personne qui dépose une demande.
*Remarque: L'expression «scène intacte» contenue dans le tableau suivant signifie l'état des lieux alors qu'aucun policier, agent de la paix, pompier, technicien ambulancier d’un service préhospitalier d’urgence ou tout autre premier répondant n'est arrivé.
Qui | Quel régime |
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Les éducatrices de la garderie |
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Les enfants décédés |
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Les enfants blessés (blessures physiques ou psychologiques) |
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Personnes à l’extérieur qui ont vu l’impact |
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Chauffeur de l’autobus |
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Qui | Quel régime |
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Les personnes venues porter secours aux enfants |
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Les personnes qui ont maîtrisé le chauffeur en attendant l’arrivée des policiers |
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Les parents qui venaient pour reconduire leur enfant sans être au courant du drame qui venait de se dérouler |
Le témoin de la perpétration d’une infraction criminelle ou de la scène intacte peut déposer une demande en vertu de la LAPVIC. |
Parents, enfants, frères, sœurs, grands-parents et petits-enfants de la victime*, les enfants du conjoint de la victime*, le conjoint du parent de la victime*, les enfants du conjoint du parent de la victime* et les personnes significatives au sens de la LAPVIC * Ici, les victimes sont les enfants et les éducatrices. |
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Les observateurs de la scène |
Le témoin de la perpétration d’une infraction criminelle ou de la scène intacte peut déposer une demande selon la LAPVIC. |
Les premiers répondants |
Une demande d’indemnisation peut être déposée en vertu de la LATMP en s’adressant à la CNESST. |
Qui | Quel régime |
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Parents, enfants, frères, sœurs, grands-parents et petits-enfants de la victime*, les enfants du conjoint de la victime*, le conjoint du parent de la victime*, les enfants du conjoint du parent de la victime* et les personnes significatives au sens de la LAPVIC * Ici, les victimes sont les enfants et les éducatrices. |
Ces personnes peuvent déposer une demande en vertu de la LAPVIC. Elles n’étaient pas des témoins sur les lieux. Elles auront accès à des «paniers de services» différents des personnes qui ont le même statut qu’elles et qui ont été témoins. |
Parents, enfants, conjoint, personne à charge, frères, sœurs, grands-parents et petits-enfants de l’intervenant*, les enfants du conjoint de l’intervenant*, le conjoint du parent de l’intervenant*, les enfants du conjoint du parent de l’intervenant* et les personnes significatives au sens de la LAPVIC. * Les personnes qui ont maîtrisé le chauffeur en attendant l’arrivée des policiers ont le statut d’intervenant. |
Ces personnes peuvent déposer une demande en vertu de la LAPVIC. |
Conclusion
J’ai volontairement omis d’indiquer le montant des indemnités pouvant être versées puisque ce n’est pas le but de mon propos. De toute façon, les pertes subies ne peuvent pas se calculer en chiffres.
Courage et espoir à tous ceux qui, de près ou de loin, ont vu leur vie être bouleversée par cette tragédie.
P.S. Je tiens à remercier sincèrement la Direction de l'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles du ministère de la Justice pour sa précieuse collaboration.
Les auteurs du Blogue ne peuvent donner d'opinion ni de conseil juridique relativement aux situations personnelles des lecteurs.
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