Le 7 octobre dernier, l’émission La Facture, diffusée à Radio-Canada, proposait un reportage sur «ces contrats qu’on ne lit pas». Il était plus particulièrement question du cas d’un homme à qui une compagnie de location de véhicules réclamait des dommages-intérêts de près de 15 000 $ pour les dommages causés à un camion de déménagement dont il avait mal évalué la hauteur.
Dans cette affaire (159191 Canada inc. (Discount Location d'autos et camions) c. Waddell), l’homme avait souscrit une assurance en cas de dommages. Il croyait donc que les dommages causés au camion étaient assurés. Or, la compagnie de location invoquait une clause d'exclusion stipulant que l'assurance ne s'appliquait pas dans le cas d'un dommage occasionné par un dégagement insuffisant en hauteur ou en largeur.
Cette clause, rédigée en petits caractères maigres et en lettres minuscules, se trouvait parmi un texte touffu contenant 38 lignes et ne respectait pas les normes établies au Règlement d'application de la Loi sur la protection du consommateur. Comme il s’agissait d'une clause importante, le caractère typographique devait respecter des normes minimales.
Selon le juge, un consommateur moyen ou une personne raisonnable à qui serait présenté un tel document dans une salle d'exposition d'un locateur d'automobiles ne pourrait saisir la portée ni même l'existence de la clause d'exclusion, à moins que l'on n'attire son attention sur celle-ci. De plus, le fait d'avoir mis cette clause au recto du contrat plutôt qu'au verso ne la rendrait pas pour autant lisible. L'impression générale qui se dégageait du contrat, pour une personne raisonnable et dans le contexte où il avait été signé, ne laissait pas supposer qu'une telle exclusion existait. Par conséquent, la clause a été considérée comme illisible et inopposable au consommateur.
Voici quelques autres exemples récents où des consommateurs ont eu gain de cause pour des motifs semblables :
- Dans Marcotte c. Fédération des caisses Desjardins du Québec, la Cour suprême a récemment confirmé que la mention des frais de conversion en devises étrangères au verso du relevé mensuel d'une carte de crédit était une clause externe qui devait être expressément portée à la connaissance du consommateur au moment de la formation du contrat pour lui être opposable.
- Une clause qui restreint la responsabilité d’une compagnie aérienne en matière d'assignation de sièges est légale, comme l’a tranché le juge dans Pelletier c. Air Transat AT Fond; par contre, il s'agit encore là d'une clause externe qui n'est pas opposable au consommateur, à moins d'avoir été expressément portée à la connaissance de celui-ci.
- La Société canadienne des postes s’est également vu refuser le droit d’invoquer une clause d'exonération de responsabilité contractuelle pour contester une réclamation à la suite de la perte d'un colis, cette clause externe n'ayant pas été portée à la connaissance du client lors de la formation du contrat (Nelson c. Postes Canada).
- Une clause contenue sur le site Internet d’un grossiste en voyages, dont les voyageurs n’ont jamais pris connaissance, ne peut non plus exonérer celui-ci de toute responsabilité à la suite de l'annulation d'un vol par le transporteur aérien. Une telle clause est d’ailleurs interdite dans tout contrat de consommation en vertu de l’article 10 de la Loi sur la protection du consommateur (Wilkinson c. Transat Tours Canada inc.).
- Enfin, dans Sy c. Best Buy 0972, en application l’article 10 de la loi, la juge a retenu que la stipulation de non-responsabilité contenue au contrat de sauvegarde de données informatiques conclu entre Best Buy et un consommateur était nulle.
Pour en savoir plus sur les clauses de limitation et d’exclusion de responsabilité, je vous invite à consulter cet article d’Éducaloi.
Références
- 159191 Canada inc. (Discount Location d'autos et camions) c. Waddell (C.Q., 2013-04-03), 2013 QCCQ 3560, SOQUIJ AZ-50959489, 2013EXP-1769, J.E. 2013-956.
- Marcotte c. Fédération des caisses Desjardins du Québec (C.S. Can., 2014-09-19), 2014 CSC 57, SOQUIJ AZ-51108751, 2014EXP-2877, J.E. 2014-1643.
- Pelletier c. Air Transat AT Fond (C.Q., 2014-08-08), 2014 QCCQ 7483, SOQUIJ AZ-51102727.
- Nelson c. Postes Canada (C.Q., 2013-06-21), 2013 QCCQ 6463, SOQUIJ AZ-50983234, 2013EXP-2463.
- Wilkinson c. Transat Tours Canada inc. (C.Q., 2013-06-26), 2013 QCCQ 6798, SOQUIJ AZ-50987897, 2013EXP-2586.
- Sy c. Best Buy 0972 (C.Q., 2011-09-30), 2011 QCCQ 12369, SOQUIJ AZ-50797281, 2011EXP-3563.
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