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Pour faire suite au billet «Au party de Noël, tout est permis! Vraiment?», publié par ma collègue Me Annick Poulin, voici l’histoire d’un party de retraite…

Le 27 mai 2016, le directeur du service des loisirs d’une municipalité s’est rendu à une fête organisée à l’extérieur du travail pour souligner le départ à la retraite d’une collègue. Au cours de la soirée, il a commis des attouchements sexuels à l’endroit d’une employée subalterne, laquelle a porté plainte auprès de la direction des ressources humaines. Le directeur a été suspendu sur-le-champ de ses fonctions. 

Conformément à la politique en vigueur à la municipalité, une ressource externe a été mandatée afin de faire la lumière sur les allégations de harcèlement sexuel visant le directeur. L’enquêteur a conclu que la soirée du 27 mai était en lien avec le travail, que les allégations de harcèlement sexuel étaient fondées et que le comportement du directeur avait porté atteinte à la dignité et à l’intégrité psychologique de la victime, en plus de créer des conditions de travail défavorables, vu la relation d’autorité entre les deux.

Congédié le 21 juin suivant, le directeur a déposé une plainte en vertu des articles 72 et ss. de la Loi sur les cités et villes à l’encontre d’une destitution injuste, mais sans succès.

Dans une décision rendue le 12 janvier 2017 (Thivierge et Ville de Thetford Mines), le Tribunal administratif du travail (TAT) fait état de la politique adoptée par la municipalité afin de contrer le harcèlement psychologique et sexuel ainsi que la violence en milieu de travail. Il rappelle les obligations légales de l’employeur de prévenir le harcèlement psychologique et de le faire cesser dès qu’une telle conduite est portée à sa connaissance (art. 81.19 de la Loi sur les normes du travail). L’employeur est également tenu de protéger la santé, la sécurité et la dignité du salarié (art. 2087 du Code civil du Québec) et de fournir des conditions de travail justes et raisonnables (art. 46 de la Charte des droits et libertés de la personne).

Le TAT conclut que la preuve contre le directeur est accablante. Il constate une gradation des actes commis à l’endroit de la victime au cours de la soirée du 27 mai, et ce, malgré les refus de cette dernière. Il souligne que le directeur admet intégralement ce qu’on lui reproche à cette soirée mais persiste néanmoins à nier qu’il s’agisse de harcèlement sexuel. Le juge administratif écrit : «Son intention déclarée de s’amuser et non de vouloir harceler est peu pertinente et sa consommation d’alcool ne peut lui servir de défense, compte tenu de sa responsabilité de directeur et étant donné la preuve, notamment des textos, démontrant qu’il connaissait ou devait connaître la portée de ses gestes.» (paragr. 33).

De l’avis du TAT, l’attitude désinvolte du directeur devant les conséquences sérieuses pour la victime est incompatible avec les fonctions occupées. Son inconduite justifiait la décision de le destituer.

Référence

Thivierge et Ville de Thetford Mines (T.A.T., 2017-01-12), 2017 QCTAT 135, SOQUIJ AZ-51356676. À la date de diffusion, la décision n’avait pas fait l’objet de pourvoi en contrôle judiciaire.

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